Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
Né de l’univers Marvel, créé en 1988 en tant qu’adversaire particulier de Spider-Man, Venom est un personnage qui a très tôt suscité les passions, au point que l’éditeur ait décidé d’engendrer des spin-off, quitte à lui donner sa propre série. Il paraissait évident, à l’époque où Sony avait laissé carte blanche à Sam Raimi pour sa trilogie sur le Tisseur, que Venom aurait droit de cité. Après avoir passé légitimement en revue le Green Goblin et Doc Octopus, c’est dans Spider-Man 3 que Raimi a introduit Venom, jouant avec ses origines et ne parvenant pas, cette fois, à convaincre totalement le public (la faute, en partie, à la volonté de n’avoir pas concentré le script sur le seul conflit entre le Symbiote et Peter Parker et d’avoir pour le coup multiplié les rivaux du Monte-en-l’air). Cependant, Sony n’étant pas prêt à lâcher l’affaire (voyez comment ils exploitent jusqu’à plus soif la licence acquise auprès de Marvel en rebootant régulièrement les films), il devenait naturel que Venom refasse une apparition au cinéma, quand bien même Spider-Man ait acquis un droit de passage pour apparaître dans le Marvel Cinematic Universe. De l’aveu même de Tom Hardy, séduit par la nature schizophrénique de l’individu – et convaincu par son fils de dix ans, grand fan du personnage – on parle d’une trilogie centrée sur Venom… pour peu que le premier film fasse recette.
Hélas, Venom le film semble bien mal parti pour engendrer des suites. Doté des mêmes qualités que les Amazing Spider-Man (une production généreuse, un casting pertinent), il souffre également des mêmes défauts : un scénario bancal, une réalisation mollassonne, des protagonistes et seconds rôles ratés, un humour bas de plafond et une orientation clairement grand public (ce dernier apparaissant rédhibitoire pour qui connaît un tant soit peu le potentiel de destruction et de cruauté de Venom). Loin des films d’horreur récents, desquels il aurait pu prétendre faire partie, le métrage de Ruben Fleischer est conçu avant tout comme un spectacle familial, fondé sur une alternance calculée de séquences enlevées (cascades, bastons, poursuites et fusillades) et de moments de tendresse (le couple Eddie/Anne étant mis en avant) baignant dans une atmosphère bon enfant de SF primaire (de méchants extraterrestres, un magnat de la haute technologie sans scrupules) : le prototype du film d’action selon les Etats-Unis en 2019. Les Symbiotes sont puissants et ne rechignent pas à zigouiller ceux qui leur barrent la route, d’autant qu’ils ont besoin de se nourrir, mais les décapitations se font hors champ et les lacérations n’engendrent aucune goutte de sang.
Tom Hardy, associé à la production, était pourtant emballé par le projet, pas seulement pour faire plaisir à son rejeton, mais également, d’après ses dires, par la perspective d’interpréter ce personnage coupé en deux entités fusionnées : Eddie Brock, journaliste d’investigation, loser magnifique, qui va perdre son job et la femme qu’il aime en utilisant des documents confidentiels dont elle disposait pour tenter de révéler les secrets morbides derrière la réussite insolente de Carlton Drake, visionnaire PDG à la tête d’une entreprise ne cherchant pas moins qu’à résoudre les crises planétaires par des recherches conjointes sur le plan médical et spatial ; et Venom, symbiote extraterrestre facétieux mais doté d’un certain sens de l’honneur, qui trouve en Eddie un hôte compatible et cultivant les mêmes tares et envies. Ce Venom fait partie de spécimens rapportés sur Terre par une expédition commanditée par Drake, lequel veut s’en servir pour créer des hybrides humains capables de survivre dans des conditions non-terrestres.
Exit donc le profond ressentiment anti-Spider-man que partageaient les Eddie et Venom des comics et même du film de Sam Raimi – puisqu’en dehors d’une très vague allusion sur le passé houleux d’Eddie à New-York, il ne sera jamais fait mention du super-héros arachnoïde. L’Eddie de Tom Hardy est un costaud au grand cœur, maladroit en amour et jusqu’au-boutiste dans ses enquêtes ; si sa dernière a foiré, il saisira la première occasion de retourner creuser derrière la façade trop proprette de Drake, et il refusera de considérer que son couple est fichu, même si son ex-fiancée fréquente un médecin. Et il faut admettre que l’acteur britannique s’en sort plutôt bien, même si certaines séquences (comme celle au restaurant de fruits de mer) frisent le ridicule : son charisme animal, son regard étonnamment doux nous donnent le portrait contrasté d’un homme paradoxal, capable de grandes choses mais incroyablement peu clairvoyant ou perspicace. Le cœur du film (lorsqu’il prend conscience de la présence d’un parasite qui lui confère des pouvoirs inouïs) recèle un vrai potentiel comique et ses dialogues surréalistes avec l’entité qui partage son corps suscitent de petits moments de joie.
Reste une histoire convenue avec des personnages aux motivations assez floues, une gestion du temps étrange et des attitudes contradictoires. Si Hardy fait incontestablement le job (et qu’est-ce que ce serait si on pouvait voir les très nombreuses séquences coupées au montage qu’il a déplorées !), ses partenaires et antagonistes font piètre figure. Néanmoins, la représentation de Venom est l’un des autres atouts de la production : ayant opté pour une version numérique plutôt que la performance capture qui ne rendait pas suffisamment, les truqueurs nous proposent une créature plutôt réussie, impressionnante tant par sa silhouette que par sa texture semi-liquide aux reflets moirés. Ce masque grimaçant à la langue préhensile ravira les anciens lecteurs de Spider-Man qui regretteront d’autant plus l’orientation limitée de l’anti-héros (car Venom, capable des pires actes de cruauté sur l’entourage de Peter Parker, refusait de blesser un innocent), ne retrouvant cette singularité qu’en de très rares occasions et notamment lors des clins d’œil à la fin. A noter également une sympathique séquence post-générique avec une hénaurme surprise annonçant des suites potentiellement sanglantes.
Un film pour petits et grands, donc, qui décevra fortement les amateurs de Venom qui n’en auront qu’un succédané édulcoré mais qui s’inscrit fort bien dans le registre déjà bien balisé des productions Marvel. Quant aux fans de Tom Hardy, ils (et surtout elles !) en auront pour leur argent.
En DVD, blu-ray, blu-ray 4K UHD et VOD depuis le 18 février 2019 chez Sony Pictures ; outre de nombreux bonus concernant la production et l’adaptation du personnage dans les éditions blu-ray, vous aurez droit à 5 minutes de scènes coupées ou rallongées (ce qui est loin toutefois du nombre de séquences dont Tom Hardy regrette la suppression).
Titre original |
Venom |
Date de sortie en salles |
10 octobre 2018 avec Sony Pictures |
Date de sortie en vidéo |
18 février 2019 avec Sony Pictures |
Photographie |
Matthew Libatique |
Musique |
Ludwig Göransson |
Support & durée |
DVD Sony (2019) zone 2 en 2.40 :1 / 112 min |
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