Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
Dans l’ombre de Mary : Voici enfin notre avis sur le film surprise projeté lors du showeb. Pas vraiment un biopic, encore moins un documentaire, Dans L'Ombre De Mary, La Promesse De Walt Disney raconte la genèse de l'un des plus grands classiques du cinéma, en y ajoutant ce qu'il faut de fantaisie pour toucher juste. Porté par des acteurs époustouflants et une reconstitution remarquable des années 60, le film de John Lee Hancock captive par sa facilité à recréer ces moments magiques indissociables de la firme aux grandes oreilles. Immanquable pour les fans du long-métrage de Robert Stevenson… et pour les autres aussi !
Une sortie simultanée pour fêter comme il se doit les 50 ans de la plus célèbre des nurses britanniques avec la distribution sur nos écrans du film Dans L'Ombre De Mary : La Promesse De Walt Disney et la nouvelle édition HD de Mary Poppins. Il semble que l'attrait pour ce grand classique aux nombreuses récompenses soit intact, en témoigne la remarquable qualité éditoriale du Blu-ray à venir (et déjà sorti outre-Atlantique). On aurait néanmoins pu se demander si faire tout un film de fiction sur sa création était bien nécessaire, quand bien même celle-ci s'est avérée être un processus chaotique pour ses auteurs, donc intrigant pour son public. Et c'est en voyant le résultat, réalisé par John Lee Hancock, que l'on comprend qu'un documentaire n'aurait pas suffi à retranscrire l'ambiance qui régnait aux studios à cette époque lors de la rencontre de ces deux mondes que tout oppose : l'étouffante chaleur et familiarité des Etats-Unis symbolisée par Walt Disney et le flegme apparent de l'Angleterre représenté par la glaciale Pamela Lyndon Travers.
Car tout le film fonctionne sur l'opposition, sur la dualité, avec un montage alternant passé et présent et des personnages en constante contradiction (avec les autres comme avec eux-mêmes bien évidemment). Ce jeu sur les contrastes est parfois poussé à la limite de la caricature mais il sert finalement bien le propos en insufflant ce qu'il faut de naïveté et d'émotion pour s'attacher à ce duo de personnalités complexes refoulant un lourd fardeau. Deux manières d'aborder le poids du passé et des responsabilités, avec l'exubérance et l'hyperactivité d'un Walt Disney trop aimable pour être totalement sincère et le détachement d'une Pamela Lyndon Travers dont la franchise côtoie souvent l'impolitesse, masquant tous deux un profond manque de reconnaissance et un besoin d'affirmation. Et c'est ce qui est le plus intéressant dans le film : comprendre en quoi les traumatismes du passé qui construisent les protagonistes vont jouer un rôle dans leur développement artistique. Ce n'est pas tant l'histoire du tournage de Mary Poppins (qui n'est d'ailleurs pas montré) qui passionne le réalisateur, mais bien en quoi une œuvre aussi populaire et appartenant désormais au public a pu être modelée par l'affect et l'expérience de ses créateurs. Pour résumer, comment l'art est inspiré par le réel. En revenant sur l'enfance de l'auteure, dans des scènes sous forme de flashback n'alourdissant jamais la trame principale, le film gagne en authenticité et en humanité. L'on pouvait craindre un côté très académique et laborieux mais ces séquences sont au contraire totalement essentielles dans la caractérisation - bien plus subtile que prévue - de Pamela Lyndon Travers. Et si, paradoxalement, le réalisateur n'hésite pas à user de clichés et à tricher avec la réalité historique, c'est pour mieux capter l'essence même de ce qui fait le charme et la profondeur de cette histoire.
On est évidemment conscient que tout est romancé, que le scénario joue sur la corde sensible des spectateurs ; pourtant, cette touche de fantaisie qui parcourt le film participe pleinement à sa grande réussite. Car on ne peut évoquer la gravité de Mary Poppins sans y associer un brin de merveilleux et de naïveté. En adoptant précisément cette démarche, John Lee Hancock inscrit son film dans l'exacte continuité artistique de l'œuvre de Pamela Lyndon Travers et Robert Stevenson. C'est en cela que le casting est plus que judicieux : la popularité de Tom Hanks lui confère la carrure adéquate pour ce rôle difficile et très attendu. Sa qualité de jeu, sa bonhomie naturelle, semblent lui donner ce qu'il faut de magnétisme pour exprimer les deux facettes opposées du film et en donner le ton : entre intensité et insouciance. Face à lui, la formidable Emma Thompson (Love actually, Harry Potter et bien entendu Nanny McPhee !), délicieusement théâtrale. On est heureux également de retrouver Paul Giamatti, Jason Schwartzman (ah quel plaisir de voir les frères Sherman !) et surtout un Colin Farrell incroyablement émouvant (en couple avec Ruth Wilson, que l'on avait découvert l'année dernière dans Lone Ranger). Que l'on soit fan ou non du roman, on quitte la projection avec l'envie de revoir au plus vite le film de Robert Stevenson (sorti en 1964).
Depuis quelques temps Disney semble comme revigoré, avec la production de projets (en dehors des Marvel) de plus en plus originaux ou risqués. On souhaite à ce film plus de succès que les pourtant excellents Lone Ranger et John Carter, car si l'on pourrait trouver énormément de défauts à celui-ci, ce n'est rien en comparaison de ce moment de bonheur qu'il nous inspire. Un très très beau film, recommandé aux admirateurs du studio ravis de découvrir énormément d'anecdotes sympathiques, et aux autres, qui seront sans aucun doute intéressés par un aspect peu connu du processus de création artistique. Vivement recommandé !
Ma note (sur 5) : |
4,5 |
Titre original |
Saving Mr Banks |
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Mise en scène |
John Lee Hancock |
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Date de sortie |
5 mars 2014 avec Disney |
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Scénario |
Kelly Marcel & Sue Smith |
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Distribution |
Tom Hanks, Emma Thompson, Colin Farrell, Paul Giamatti & Jason Schwatrzman |
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Photographie |
John Schwartzman |
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Musique |
Thomas Newman |
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Support & durée |
35 mm en 2.35:1 / 131 min |
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