Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
Parfaitement produite, construite sur des rails solides (le script original est en béton armé et les différents scénaristes qui s'y sont collés n'ont eu qu'à remettre au goût du jour) et dotée d'un casting ultra-glamour - quoique un brin surprenant - cette nouvelle version du western à grand spectacle de Sturges fait preuve de suffisamment de bon goût mâtiné d'une certaine humilité de bon aloi pour faire adhérer même les plus réticents.
On pourra ainsi, en profitant du confort de la vidéo, analyser la démarche consistant à ne (surtout) pas s'aliéner les nostalgiques du modèle tout en ménageant quelques ouvertures pour plaire aux plus jeunes. Le film d'Antoine Fuqua oscille entre deux tendances et choisit un compromis parfois trop tiède, ne cherchant jamais à ringardiser l'original (qui n'est lui-même qu'un remake) tout en insérant des touches de pop culture fun et jouissive. Comme le disait Nico plus haut, c'est plaisant. Et même la seconde fois. Le menu sobre est accompagné du thème à peine modifié d'Elmer Bernstein - et ça, ça vous met d'emblée la patate. Le score du duo James Horner & Simon Franglen (le second ayant terminé la composition posthume du premier) sera toutefois moins convaincant dans le déroulé du film, avec ces itérations (quelques notes de cuivres) rappelant trop fortement le Jerry Goldsmith de Patton.
Les choix scénaristiques sont du même acabit : par moments, on va retrouver les mêmes scènes - et parfois certaines des répliques du film de Sturges (comme le recrutement de Goodnight/Ethan Hawke & Billy/Byung-Hung Lee qui est la copie conforme de celui de Britt/James Coburn) ; mais le script de Wenk & Pizzolatto s'éloigne d'autres fois sensiblement de l'original. Ainsi, le personnage central a été conçu à l'image de celui de Chris/Yul Brynner : un homme solitaire, imposant, sûr de lui et qui ne se laisse pas facilement émouvoir. Denzel Washington est parfait pour coller à la peau de ce leader pragmatique, pourtant on va lui rajouter une motivation supplémentaire qui, si elle est censée enrichir le personnage (il faut avouer qu'ils ne sont guère creusés), appauvrit paradoxalement le contexte : ce n'est pas uniquement par principe moral que Sam Chisolm accepte d'aider les colons du petit village de Rose Creek, mais quelque élément trouble de son passé. D'ailleurs, s'il mène sa barque au départ avec rigueur, il accepte aussi d'engager des éléments rencontrés par pur hasard, comme Red Harvest. Et là où le premier Sept Mercenaires dressait un constat amer sur la "profession" de pistolero, en une sorte de crépuscule du Far-West légendaire (avec de jolies phrases sur l'avenir appartenant aux fermiers), la version 2016 se contente d'en faire des héros "magnifiques" (pour reprendre le titre original et la dernière phrase du film), certains se rachetant une conduite pour l'occasion.
Ne boudons pas notre plaisir toutefois, car comme on l'annonçait, le casting est de haute volée, et souvent agréablement surprenant. D'Onofrio est délicieusement bestial, Chris Pratt tente (avec succès) d'être au moins aussi cool que Steve McQueen et Martin Sensmeier campe un Comanche terriblement magnétique. En face, Sarsgard en fait des tonnes dans le rôle de l'implacable Bogue, à la limite du ridiculement rétro. Et il faut avouer qu'Haley Bennett, qui joue la jeune veuve avec "assez de couilles" pour se dresser sur son chemin et recruter des mercenaires, dispose de suffisamment de sensualité farouche pour magnétiser la pellicule. Enfin ça fait plaisir de revoir Ethan Hawke aussi impliqué (son rôle de Goodnight Robicheaux, de loin le plus riche de tous, est également le seul à surpasser son modèle de 1961 : Lee, joué par Robert Vaughn).
Construit de bric et de broc, dispensant quelques jolis moments de camaraderie entrecoupés de hauts faits d'armes, les Sept Mercenaires choisit le spectacle à l'ancienne en multipliant les cascades et les effets pyrotechniques et en tournant dans des décors en dur en Louisiane (pour le village) et au Nouveau-Mexique. Les 2h13 passent sans qu'on s'en aperçoive et le spectacle est garanti.
Titre original | The Magnificent 7 |
Mise en scène | Antoine Fuqua |
Sortie en salles | 28/09/2016 avec Sony Pictures |
Sortie en vidéo | 1er février 2017 avec Sony Pictures |
Scénario | Richard Wenk, Nic Pizzolatto d’après Akira Kurosawa, Shinobu Hashimoto & Hideo Oguni |
Distribution | Denzel Washington, Chris Pratt, Ethan Hawke, Vincent D’Onofrio, Byung-Hung Lee, Manuel Garcia-Ruffo, Peter Sarsgaard, Martin Sensmeier & Haley Bennett |
Photographie | Mauro Fiore |
Musique | James Horner & Simon Franglen |
Support & durée | DVD Sony (2017) zone 2 en 2.35 : 1 / 133 minutes |
Synopsis : L’industriel Bartholomew Bogue règne en maître sur la petite ville de Rose Creek. Pour mettre fin au despotisme de l’homme d’affaires, les habitants, désespérés, engagent sept hors-la-loi, chasseurs de primes, joueurs et tueurs à gages – Sam Chisolm, Josh Farraday, Goodnight Robicheaux, Jack Horne, Billy Rocks, Vasquez, et Red Harvest. Alors qu’ils se préparent pour ce qui s’annonce comme une confrontation sans pitié, ces sept mercenaires prennent conscience qu’ils se battent pour bien autre chose que l’argent…
Un bon réalisateur, un bon casting, une bonne histoire, Les 7 Mercenaires est un bon film. Remake d’un remake d’un film culte, autant dire que l’on connait par avance le déroulement du récit, mais quand c’est fait avec une telle sincérité, on se régale et on vous le recommande vivement !
Un remake du film de John Sturges, lui-même remake des 7 Samouraïs de Akira Kurosawa. Autant dire que tout le monde connaît l’intrigue des 7 Mercenaires, même les plus jeunes graines de cinéphiles car Pixar en avait fait également une fidèle adaptation avec son chef d’œuvre 1001 Pattes.
Antoine Fuqua avait donc du pain sur la planche pour nous faire adhérer à son envie de re-re-reraconter cette histoire. La démarche est presque ambitieuse, puisqu’il s’agit de se mesurer à des classiques, mais l’on doutait de l’utilité d’un tel projet. Surtout que les westerns ne sont plus gages de succès à Hollywood, on en veut pour preuve le très bon Lone Ranger et dans une moindre mesure – puisqu’il se déroule en partie juste après la guerre de Sécession - l’extraordinaire John Carter d’Andrew Stanton.
Pourtant, cela fonctionne une nouvelle fois. C’est très correct, le scénario est balisé et vous aurez toujours une longueur d’avance sur l’intrigue. Mais c’est surtout un divertissement efficace, généreux, et qui ne prend pas le genre en dérision. C’est un véritable western, avec ses codes, ses clichés, fait à l’ancienne avec un profond respect pour son public. Visiblement, Antoine Fuqua, à qui l’on doit le sympathique The Equalizer avec Denzel Washington, a voulu s’amuser avec sa réinterprétation dynamique et gonflée à bloc des aventures de ces 7 Mercenaires. Peu importe finalement que l’on ait déjà vu ça ailleurs : le réalisateur est plutôt bon (toutes proportions gardées), le casting est très bon, l’histoire est bien entendu bonne, en d’autres termes le film est bon. Il y a tant d’autres remakes bien plus inutiles ! Au moins l’on ne pourra pas se plaindre que nous sommes envahis par les westerns au cinéma, et cela fait toujours son petit effet que de pouvoir apprécier de somptueux paysages américains en plan large sur un grand écran.
Bien évidemment, il manque un peu d’émotion et de profondeur, la version d’Antoine Fuqua ne faisant pas dans la finesse et ne développant jamais les personnages plus que nécessaire. On se retrouve ainsi devant une équipe de mercenaires acceptant de collaborer sans réelle hésitation, et ne suscitant que peu de réactions de la part du village qu’ils sont censés protéger.
Mais difficile de faire la fine bouche face à cette bande d’acteurs charismatiques donnant vraiment l’impression d’avoir trouvé avec ce film un formidable terrain de jeu. On ne va pas tous les citer, mais Ethan Hawke est comme toujours impeccable, Chris Pratt fait du Chris Pratt (il est parfait dans ce genre de rôle), Vincent D’Onoffrio est hilarant, Byung-Hung Lee en impose et Denzel Washington, comme à son habitude, déborde de classe et de charme. Les dialogues irrésistibles fusent comme les balles, les scènes d’action sont nombreuses et plutôt bien chorégraphiées.
De quoi passer une super séance de cinéma. Vous l’aurez compris, c’est certes totalement dispensable, mais on vous le recommande vivement !