Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
Porter à l'écran la vie d'un malfrat est une arme à double tranchant : les péripéties inévitables que va traverser le faux héros pour en arriver à sa célébrité de criminel sont toujours fascinantes à regarder, mais le risque est bien souvent d'altérer un peu la réalité pour adoucir le caractère, biaiser le propos et rendre le personnage bien plus humain et sympathique qu'il ne pouvait l'être. Cette "héroïsation" atteint souvent ses limites, surtout si l'interprétation est bonne. Du coup, je m'attendais, honnêtement, à quelque chose de moins maîtrisé et cohérent que ça.
En fait, à part çà et là quelques mouvements frénétiques (lors des séquences de braquages notamment), la caméra sait tempérer son dynamisme en cadrant serré et en ménageant quelques beaux mouvements fluides et expressifs. Cela permet ainsi de mieux assimiler la progression étonnante de cet individu qu’on croyait connaître.
Comme peu de temps auaravant dans le film sur Spaggiari (Sans arme, hi naine, ni violence de Jean-Paul Rouve – 2007), Richet use de séquences en split-screen de façon maligne sans que ce soit barbant (au contraire, j'aime assez car cela donne un certain cachet et rappelle instantanément et sans effort l’ambiance de ces années-là) ; le générique, en outre, va plus loin dans le point de vue puisque les différents écrans, au lieu de découper l'action suivant les angles, montre la même mais sous différentes prises (les mouvements ne sont pas synchrones) : un peu tape-à-l'oeil mais incontestablement fascinant. On a affaire à du cinéma plutôt efficace mais également bien pensé, parfois même élégant.
La bande originale est réussie et très agréable à l'oreille, accompagnant à merveille
une bande son tonitruante qui enrobe un panel d’acteurs assez convaincants. Cassel est percutant et hypnotique, souvent impressionnant d’aisance. Ajoutez également une jolie photo, et surtout un rythme effréné sur un découpage temporel habile – qui s'avère tout de même moins sensible dans le second volet, plus lourd et didactique, plus chargé dramatiquement aussi.
Après, il nous reste à digérer l'image d'une pourriture qui, par la magie d'un cinéma assez complaisant, et malgré quelques accès insupportables (la scène où il braque sa femme est d’une insoutenable violence morale), devient immanquablement séduisant. On se surprend à l'aimer et on s'en veut ou s'en désole.
Une franche réussite.
Titre original | Mesrine : l’Instinct de mort |
Date de sortie en salles | 22 octobre 2008 avec Pathé Distribution |
Date de sortie en vidéo | 17 juin 2009 avec Universal |
Photographie | Robert Gantz |
Musique | Eloi Painchaud |
Support & durée | 35 mm en 2.35 :1 / 113 min |