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Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.

la Guerre éternelle

Universal War One, tome 1 : la Genèse

 

Premier volume de la série d’albums de Denis Bajram ã Soleil 2001

 

4e de couverture : Entre Saturne et Jupiter, au cœur des jeunes Etats les plus prospères de la Fédération des Terres Unies, la troisième flotte de l’United Earthes Force veillait inlassablement sur la périphérie du système solaire. Elle assurait par son gigantisme un incroyable sentiment de sécurité à ses habitants.

Mais LE MUR est apparu.

Si grand, si sombre. Insondable.

 

Je ne suis pas en train d’évoquer les romans de Joe Haldeman – encore que ça m’y fasse directement penser : ] Joe Haldeman, la Guerre éternelle, cycle de SF de 1975 adapté en trois volumes de BD chez Dupuis.

 

Il s’agit d’une autre série ici, une série remarquable, portée dans sa quasi intégralité par un seul homme, Denis Bajram, scénariste, dessinateur et même coloriste de son premier album (la page de titre précise que ce tome a été publié dans 7 numéros de Lanfeust Mag dans une version légèrement différente). Dès la première de couverture, on sent qu’on se trouve en face d’une œuvre au graphisme soigné, à l’ambiance recherchée et à l’aspect fondamentalement SF. Si l’histoire n’est pas spécialement nouvelle (on y reviendra), le style puise directement dans les bases de cette littérature que les Anglo-Saxons hissent au même rang que la mainstream : c’est de la science-fiction avec des vaisseaux, sur fond de guerre cosmique. Du space opera, mon Dieu, il était temps ! Et si les dessins, aux encrages soignés, notamment sur les effets de lumière (les plans en orbite autour de Saturne sont magnifiques) renvoient à une imagerie très récente, inspirée des comics, les thèmes sont nettement plus classiques. On y retrouve un contexte de Fédération humaine, une armada de vaisseaux qui renvoient à des idées développées du temps d’Edmond Hamilton (cf. les Rois des Etoiles) où les guerres spatiales se déroulaient sur des échelles inconcevables et où une arme terriblement destructrice pouvait annihiler une civilisation. On est sensiblement plus proches des héros des histoires naïves et viriles de E.E. « Doc » Smith que de Star Trek. Plus proche de nous, cette escadrille « Purgatory » constituée d’anciens malfrats genre « Têtes brûlées » rappelle les personnages peu engageants de l’équipage vaguement pirate d’Alien IV, la Résurrection : un passé mystérieux ou honteux, des caractères bien trempés et exacerbés, des dialogues dégoulinant de testostérone, bref, toute une bande d’anti-héros potentiels, de l’irréductible casse-cou au couard invétéré.

 

Le sujet, en revanche, est loin d’être aussi primaire : le Mur gigantesque qui surgit et semble confiner (condamner ?) l’Humanité à l’intérieur du Système solaire est loin d’être un simple gadget scénaristique et ses secrets se dévoilent rapidement, tout en conservant assez de mystère pour tenir encore un bon moment en haleine. D’une part, et très vite, ses dimensions se trouvent calculées et ramenées à des proportions moins « cosmiques ». Puis interviennent les dissensions politiques, les prétextes stratégiques : les hommes retombent dans leurs travers, dès lors qu’ils ont peur et ne comprennent pas. On cherche un bouc émissaire dans son propre camp, c’est plus simple que d’aller voir de l’autre côté – si tant est que cela soit possible. Or, un ex-scientifique de génie, relégué dans l’escadrille susnommée, croit pouvoir y arriver…

 

A vrai dire, en ouvrant l’ouvrage après avoir lu la 4e  de couverture, je m’attendais à quelque chose comme cette barrière imaginée par Philip Jose Farmer dans sa Saga des Hommes Dieux, où nous apprenons que notre univers n’est qu’un « monde de poche » créé par des êtres dotés de pouvoirs incommensurables qui s’amusent à se fabriquer des « cosmos privés » pour y jouer à loisir et s’amuser aux dépens des créatures qui y vivent. Mais cela va plus loin qu’une simple illusion destinée à nous faire croire à l’infini de l’espace, on se rapproche de l’idée centrale de la saga actuelle de Peter F. Hamilton, l’Etoile de Pandore (dont j’ai chroniqué les deux premiers volumes ici et ) : là où, dans les romans du Britannique, une étoile et ses planètes avaient été littéralement « occultées », on a affaire dans la BD de Bajram à une partie de notre système enfermée derrière une paroi sombre prenant l’aspect d’une sphère de trois milliards de kilomètres de diamètre centrée sur un satellite d’Uranus ; dans les deux cas, les forces mises en œuvre sont colossales, ce qui suppose une technologie inouïe. Comment les hommes pourront-ils affronter ce qui se cache derrière cette extraordinaire volonté capable de mettre sous coupe un tiers du ciel observable ? Au-delà des moyens développés pour parvenir à percer le secret de ce « Mur », c’est bien la révélation de ce qui se trouve de l’autre côté et surtout la façon dont l’Humanité réagira qui rendra la suite passionnante. Car ce volume 1 s’achève sur un suspense habile appelant des péripéties hautes en couleurs.

 

Au commencement, le souffle de Dieu tournoyait au cœur des Ténèbres, et les Ténèbres recouvraient l’abîme. Dieu dit : « Que la Lumière soit. » Et la Lumière fut. Dieu vit que la Lumière était bonne, et Dieu sépara la Lumière et les Ténèbres. Dieu appela la Lumière « énergie » et les Ténèbres « espace/temps ». Il y eut un soir, il y eut un matin. Ce fut le premier jour.

Bible de Canaan, Genèse

 

C’est suite à un post élogieux dans un forum que je fréquente que je me suis laissé tenter. Je ne regrette pas, il s’agit d’une SF de facture classique menée avec enthousiasme et savoir-faire, à un rythme peut-être un peu trop enlevé (on aimerait parfois que l’action se pose pour qu’on puisse profiter de l’environnement et digérer les informations). A suivre donc.

 

fl--che23.gifVoir aussi :

Ü      Fiche technique, résumé, critique et avis de lecteurs ainsi que le visuel de la couverture et quelques images sur BDSélection

Ü      Une fiche sur l’Arme de Nulle part de Edmond Hamilton sur Bibliotheca

Ü      Synopsis du tome 1 sur le site de Denis Bajram (on peut y trouver plein de bonus comme un storyboard, des croquis et fiches de personnages et des design de vaisseaux)

 

 

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J
De nada !
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V
Ha ha ! Je n'aurais pas dû te donner ce renseignement, vile espionne ! Mais c'est gentil de penser à moi. Merci.
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J
Je ne sais pas où le placer alors je le mets sous le dernier article publié : JOYEUX ANNIVERSAIRE VANCE !Bisous !
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V
Ah ha ! Bon retour parmi nous nico ! Je ne te savais pas amateur d'UW1, mais je partage nombre de tes goûts. Merci d'être passé. Que sais-tu donc de Bajram ?
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N
il y a dans cette saga, un rapport au temps qui est assez hypnotisant. Sur la fin, c'est carrément vertigineux. un rapport au temps et à la pérennité de certaines facettes de la personnalité de l'homme... La rédemption n'est pas prévue dans l'éternité, tout juste dans l'immortalité.une oeuvre magistrale, désenchanté comme un peu l'être quand on a vecu ce que l'auteur du roman originel a vécu.
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V
Oui, l'ampleur du vide séparant les (éventuels) mondes habitables rend l'idée même d'un empire terrien inconcevable - à moins d'user d'expédients comme le voyage (ou saut) hyperspatial ou, mieux, les portails créant une brèche dans le continuum (voir les Cantos d'Hypérion pour ce que j'estime être la meilleure exploitation de cette idée de déplacement instantané).
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R
C'est le monolithe noir de 2001 rendu immense ?Ce qui m'étonne toujours un peu, dans le space-opéra, c'est la différence entre un monde terrestre plein de vie et ce monde intersidéral rempli plutôt de vide (de mort). Cela fait "empire des fantômes". On se demande comment il est possible que l'humanité crée un empire habité et vivant au travers de tout le système solaire. C. S. Lewis disait que le système solaire était habité par des anges, et que la lumière était leur matière vive, organique, tandis que la matière visible, sur laquelle la matière se posait, était en réalité du vide ; si on entre dans une vision de ce genre, l'univers change de face. C'est moins effrayant.
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J
Ah ces murs alors !!! Il faut toujours qu'ils provoquent des séparations...
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