Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
Disponible depuis le 1er septembre 2023, le coffret Rimini Éditions de Dominique ne déroge pas aux habitudes prises par cet éditeur pointilleux et permet aux curieux de pouvoir visionner un vieux film dans les meilleures conditions techniques possibles.
Synopsis : À peine remise d’une grave chute, Dominique Ballard, femme d’un riche homme d’affaires, commence à être victime d’étranges et angoissantes visions. Est-elle en train de perdre la tête ? Est-elle victime d’une machination ? La demeure du couple est-elle réellement hantée ?
Très vite, l’on se rend compte du soin apporté au nouveau master, dépoussiéré, qui voit ses couleurs boostées et sa luminosité augmentée. Pas de quoi transcender les scènes nocturnes, pourtant nombreuses, qui manquent encore de contraste, mais cela contribue à magnifier l’ambiance visuelle instaurée dès le départ. L’essentiel du métrage se déroule en effet dans une gigantesque bâtisse, la maison des Ballard, riche couple dont la femme, Dominique, récupère d’un accident récent : le spectateur aura tout loisir d’explorer bon nombre de ses pièces comme s’il était devant une resucée de la Maison du Diable. De l’imposant vestibule cerné par les grands escaliers menant aux chambres, on passera régulièrement soit au bureau, soit au salon où trône le piano sur lequel Dominique aime jouer lorsqu’elle se sent seule, soit encore dans le troublant jardin d’hiver où se mêlent statues et plantes exotiques.
La référence au film de Robert Wise (1963 quand même) n’est pas anodine : la mise en scène de l’histoire tend à imposer des hypothèses plus ou moins surnaturelles parmi lesquelles le fait que la maison soit hantée, que des esprits frappeurs y rôdent – à moins que ce ne soit une de ces machinations dont Hitchcock avait le secret (par exemple dans Soupçons qui use de procédés similaires) et dont les Diaboliques constitue une forme de parangon. C’est dire si le cinéphile se sentira d’abord à l’aise, puis petit à petit ennuyé par les évidences qui s’alignent les unes derrière les autres : rien de nouveau, en effet, dans ce scénario. Dominique a des visions, entend des voix et se persuade que son mari cherche à la rendre folle. Jusqu’au jour où Dominique perd la vie : elle se pend dans le jardin d’hiver, là même où la veille elle avait aperçu un cadavre. Une vingtaine de minutes sont passées depuis le début du métrage et on peut donc affirmer, comme dans bon nombre de bandes annonces de l’époque :
Dominique is dead. Or... is she ?
La voici donc morte. Or, dès le lendemain, David, son mari, commence lui aussi à entendre des bruits étranges : le piano se met à jouer au cœur de la nuit, une voix d’outre-tombe martèle son prénom et il finit par voir sa femme dans la rue, ou au fond d’un couloir ! Toutefois, bien loin, de perdre la boule, David, en bon homme d’affaires, sait garder son sang-froid. Il s’équipe en conséquence et entreprend d’aller y voir de plus près. Si sa femme réapparaît, c’est peut-être qu’elle n’est pas vraiment morte. Loin de lui l’idée de croire aux spectres et revenants. Le docteur lui certifiant que Dominique était bien trépassée (il avait lui-même signé l’acte de décès), il ne lui reste plus qu’à en avoir le cœur net. Peut-être que la réponse se trouve dans sa tombe ?...
Entre quelques gros plans sur quelques objets aux reflets métalliques rappelant l’influence des gialli et une atmosphère pesante se nourrissant d’un tempo lent entretenu par de longs passages silencieux prolongés par une musique lancinante, l’ambiance est le meilleur côté de la mise en scène de Michael Anderson (l'Âge de glace) qui ne propose sinon rien de nouveau ou spectaculaire. Les ombres alternent avec quelques plans hautement colorés et la majorité du film se déroule à la nuit tombée. Le visage crispé d’un Cliff Robertson bien impliqué donne du relief à l’intrigue qui ne surprendra pas grand-monde, alors que Jean Simmons n’apparaîtra finalement que très peu. Cela dit, les comédiens britanniques font le job et évoluent avec aisance dans les décors gigantesques des studios Shepperton. La durée assez courte, conclue par un retournement hautement prévisible, parviendra peut-être à convaincre les hésitants, à moins que ce ne soit la qualité du coffret avec ses deux disques et son livret.
Loin d’être effrayant ou même simplement surprenant, il se regarde sans ennui même si on se demande à la fin la signification du sous-titre français ("les Yeux de l'épouvante") assez grotesque.
Titre original |
Dominique |
Date de sortie en salles |
17 juin 1981 avec Discop |
Date de sortie en vidéo |
1er septembre 2023 avec Rimini Éditions |
Réalisation |
Michael Anderson |
Distribution |
Cliff Robertson, Jean Simmons, Simon Ward & Jenny Agutter |
Scénario |
Edward & Valerie Abraham d’après le roman d’Harold Lawlor |
Photographie |
Ted Moore |
Musique |
David Whittaker |
Support & durée |
Blu-ray Rimini (2023) region B en 1.77 :1 / 95 min |