Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
Un très très très grand coup de cœur pour ce nouveau Disney, qui vient d’ailleurs de remporter l’Oscar du meilleur film d’animation. D’une richesse thématique qui n’a d’égale que sa superbe direction artistique, Encanto est probablement ce que le studio a produit de mieux depuis Vaiana. Une réussite que l’on doit non seulement au formidable travail des scénaristes réalisateurs mais également à Lin-Manuel Miranda, le génie qui s’est fait connaître avec Hamilton. Un petit chef d’œuvre à ne pas manquer, que ce soit en DVD ou Bluray !
Il aura fallu quelques mois depuis sa sortie en salles en novembre pour qu’Encanto soit enfin évalué à sa juste valeur. Une période durant laquelle le film a gagné de nombreux admirateurs, probablement grâce à sa disponibilité sur la plate-forme Disney Plus - aux États-Unis - et à un enthousiasme communicatif sur les réseaux sociaux pour sa chanson entêtante « We don’t talk about Bruno ». La bande originale connaît en effet un succès quasi sans précédent, surpassant par là même celle de La Reine Des Neiges et son « Let it go » pourtant ultra populaire.
Il faut dire que l’un des principaux attraits d’Encanto vient de l’implication du grand Lin-Manuel Miranda, dont le talent n’est plus à prouver. Depuis sa première collaboration avec le studio Disney en 2016 pour Vaiana, l’artiste a connu un flagrant gain de notoriété auprès du grand public, qui s’est mis à apprécier la modernité de ses compositions hip hop, de véritables bouffées d’air frais dans une tradition musicale qui tend bien souvent et de plus en plus à se ringardiser d’elle-même. Parce que malgré toute l’admiration que nous avons pour les excellentes chansons de La Reine Des Neiges, elles semblent franchement avoir pris un bon coup de vieux depuis que John Musker et Ron Clements ont fait appel à Miranda pour rajeunir un peu tout ça. À ce titre, les numéros chantés d’Encanto renouent avec ce qui fait la force des meilleures comédies musicales, en étant moteurs de l’action et de la narration et non de simples vignettes illustratives permettant d’aérer le récit. On reconnaît ainsi la patte de Lin-Manuel Miranda continuellement : dans l’écriture des paroles, dans le débit, dans la musicalité des phrases, dans les nombreuses variations de tons, dans le sens des mots, dans les renvois et échos entre différentes chansons (l’air de « We don’t talk about Bruno » qui est annoncé dès « The Family Madrigal » et que l’on entend dans « What else can I do » par exemple).
Ce n’est bien évidemment pas non plus une révolution chez Disney qui a toujours travaillé avec de grands paroliers et compositeurs, mais le fait est que la touche Miranda donne à ce film une cohérence qui renforce particulièrement bien la thématique (l’interdépendance des chansons évoquant bien entendu celle des membres de la famille). La chanson « Waiting for a miracle » étant un bon exemple pour comprendre la subtilité de l’écriture, avec des paroles en VO qui annoncent littéralement tout ce qu’il va se passer par la suite, comme si Miranda possédait inconsciemment tous les dons de sa famille sans qu’ils ne soient pour autant d’origine magique, mais bel et bien naturels et innés. [NDLR. Avec une nette préférence pour la très jolie ballade en espagnol, "Dos Oruguitas", d'une exquise délicatesse.]
Mais si l’on vante les qualités de cette fantastique bande originale - y compris les musiques aux accents sud américains de Germaine Franco - il ne faut pas non plus sous-estimer le reste : Encanto n’est pas qu’un excellent musical, c’est avant tout un extraordinaire film.
Une nouvelle réussite à mettre au crédit de Charise Castro Smith, de Jared Bush et de Byron Howard, à qui l’on doit Zootopie, Raiponce, Volt, entre autres. Des réalisateurs scénaristes qui ont parfaitement compris comment raconter une histoire, se servant de la structure classique des dessins animés habituels tout en leur ajoutant une modernité plus que bénéfique.
Fond et forme n’ont jamais été aussi complémentaires, avec cette casita vivante métaphore des liens qui unissent chacun de ses habitants (qui se fissure ou se reconstruit au gré des tensions ou des réconciliations), avec ces pouvoirs magiques qui n’ont bien entendu pas été attribués au hasard (la mère dont la cuisine a un pouvoir guérisseur, la jeune femme dont la beauté n’a d’égale que son apparente réussite dans tout ce qu’elle entreprend, l’ado farceur qui se fait passer pour quelqu’un d’autre car ne trouvant peut-être pas sa place entre une grande sœur et un plus petit frère, celle qui porte le poids du monde sur ses épaules…). Ou comment faire passer une thématique a priori banale sur sa place dans la famille - tout le monde peut se reconnaître dans au moins l’un des nombreux personnages - avec une couche de magie pour la rendre encore plus accessible et évidente. Il y a tellement de personnages auxquels il est facile de s’identifier, tellement de situations familières, tellement de dialogues crédibles ! Peut-être qu’aucun autre Disney n’avait su nous toucher autant. On rit - merci au toucan -, on pleure - le plan de l’assiette, la réconciliation - et l’on se dit que depuis le début de son troisième âge d’or, Disney a enchaîné les pépites (Raiponce, La Reine Des Neiges, Les Nouveaux Héros, Zootopie, Vaiana) jusqu’à ce nouveau chef d’œuvre, jubilatoire et stimulant.
Et puis qu’est-ce que c’est beau ! La prouesse technique vaut à elle seule le visionnage de ce film. Le rendu des textures, des couleurs, et surtout l’animation ont fait de tels progrès ! Les expressions faciales sont bluffantes, rarement des personnages animés ont atteint un tel niveau de « jeu », et les mouvements sont d’une fluidité exemplaire, surtout lors des numéros musicaux (Mirabel qui danse tout en écoutant sa cousine Dolores tenter de la dissuader de chercher à contacter leur oncle Bruno). [NDLR. Observez plus particulièrement les épaules et les hanches des personnages, qui suivent à merveille le tempo des musiques et impulsent un rythme dansant à chacune des scènes.]
Ajoutez-y une mise en scène dynamique et faisant systématiquement sens avec l’action - par ses nombreux travellings par exemple - ainsi qu’un montage parfait (la scène du repas et sa chorégraphie comique notamment) et vous aurez le divertissement idéal.
Le bluray proposé par Disney est une réussite totale. Un véritable enchantement. Un disque de démonstration pour qui veut vanter l’intérêt et l’apport de la haute définition, probablement ce que l’on peut obtenir de mieux sur un disque HD.
L’image d’Encanto en bluray est absolument somptueuse. Un festival de couleurs plus éclatantes les unes que les autres, une précision impressionnante dans les arrière-plans, de la texture (les vêtements de Mirabel, l’incroyable rendu de la peau et des poils [NDLR. C'est particulièrement impressionnant chez Luisa, le petit duvet sur sa nuque est tout à fait perceptible en lumière incidente]). Tout au plus pourrions-nous reprocher une compression parfois perfectible (mais pas mauvaise) dans certains plans larges.
Le son en VO DTS HD Master Audio aurait peut-être pu être un poil plus dynamique ou puissant, mais une fois le volume correctement augmenté (comme pour tous les Disney récents), vous vous régalerez d’une piste sonore très intelligemment mixée. On a rarement entendu une telle spatialisation. Bien entendu, Encanto n’est pas un film particulièrement démonstratif dans ses effets (ce n’est pas un gros film d’action), mais il y a eu un travail assez dingue sur la répartition des sons sur les enceintes. Et si les nombreux (et excellents) morceaux musicaux sont évidemment mis en valeur par ce mixage, ce sont les dialogues et le placement des voix qui en profitent le plus. Écoutez-donc la fameuse chanson « We don’t talk about Bruno » et notez bien le nombre de fois que les personnages semblent se balader dans votre pièce selon qu’ils soient à gauche, à droite, au centre de l’écran ou hors-champ. N’oublions pas les basses, qui se font particulièrement entendre dans les chansons mais qui solliciteront énormément votre caisson lors de quelques scènes. Du très très très bon boulot. La VF en Dolby Digital Plus fait presque jeu égal avec la VO. C’est dire le soin apporté à cette édition. [NDLR. Comme d'habitude aussi, on s'apercevra du peu de différence dans le choix des voix en français par rapport aux interprètes originaux, c'est assez bluffant, même si la voix chantée de Mirabel reste plus agréable en anglais, un brin moins nasillarde et surtout si les paroles sont parfois plus niaises dans leur traduction. D'ailleurs, les habitués des séries Netflix seront sans doute surpris de découvrir que c'est Stephanie Beatriz qui interprète la voix de Mirabel, très éloignée de la troublante Rosa Diaz de la série Brooklyn Nine-Nine !].
Les suppléments sont relativement nombreux et intéressants. Du moins lorsqu’on les compare avec la plupart des éditions actuelles. Vous trouverez des modules sur la Colombie [NDLR. L'équipe artistique est allée étudier l'atmosphère et l'architecture du pays pour s'en inspirer.], la musique du film, un bêtisier, des scènes coupées et une option karaoke qu'on peut choisir au moment du lancement du film. On n'aurait pas été contre un bon gros documentaire sur la conception du long-métrage (voire sur son succès), mais très sincèrement ce que l’on a est déjà très satisfaisant.
Y est également intégré le traditionnel court-métrage Disney-Pixar qui accompagne chaque lancement de film : c'est Far from the tree cette fois, une jolie petite historiette qui parvient à compiler toute la thématique de Bambi en quelques minutes, avec un trait simple et des décors épurés, et une morale sans surprise mais non sans émotion avec un petit raton-laveur qui apprend à devenir grand...
Vous l’aurez compris, l’on ne peut que vous recommander d’acheter ce bluray … parce que c’est la meilleure édition disponible en France !
Pas d’UHD français, contrairement à nos voisins Outre-Atlantique et Outre-Manche.
Nous avons justement eu l’occasion de voir l’UHD UK et la différence avec le bluray est tellement énorme que nous ne comprenons pas cette politique de Disney France de ne pas éditer ses films d’animation dans ce format chez nous. Car Encanto en UHD est probablement ce que nous avons vu de plus beau sur un diffuseur en plus de 20 ans de home cinema. Rien que ça ! Le bluray paraît fade en comparaison, c’est dire ! Si la définition est plus ou moins similaire avec le bluray (le film n’est qu’en 2K à l’origine, soit un tout petit peu plus de précision qu’une copie bluray), l’UHD paraît pourtant beaucoup plus net : les lunettes de Mirabel, les pétales qui parsèment la chambre d’Isabela, les feux d’artifice, la végétation dans la chambre d’Antonio… Mais ce qui étonne le plus, ce sont les contrastes : la copie UHD est souvent beaucoup plus sombre que le bluray, ce qui permet de faire ressortir davantage les superbes couleurs du film et les nombreuses sources lumineuses, telles que les flammes des bougies ou les représentations de la magie. Une démonstration de l’intérêt du HDR. Mention spéciale à la scène de la chanson « What else can I do » avec toutes ces fleurs colorées qui jaillissent à l’écran et aux couleurs du segment de Dolores dans la chanson « We don’t talk about Bruno ». En fait, toutes les fantastiques couleurs déjà visibles sur le bluray paraissent surtout mieux équilibrées, plus affirmées et donc plus cohérentes. L’image a un rendu plus vivant, avec un effet de relief très appréciable. Et l’on y gagne donc en immersion. Le son quant à lui est sensiblement identique, même si l’on y gagne un peu en VO. La piste DTS HD Master Audio du bluray devient une piste Dolby Atmos en UHD, qui possède plus ou moins les mêmes défauts (il faut jouer de la télécommande pour augmenter le volume à un niveau habituel) et les mêmes qualités. L’Atmos, plus subtil, donne un peu plus d’ampleur au mixage, les murs de la pièce semblent écartés. La piste VF québécoise est en Dolby Digital Plus, et fait jeu égal avec la piste VF parisienne du bluray français. Au jeu des différences, on vous avouera avoir une légère préférence pour le doublage québécois, dont les voix et la traduction sont plus proches de la version originale (et qui nous évite cet accent qui semble totalement caricatural pour la voix d’Augustín Madrigal). Les chansons sont néanmoins identiques entre les deux VF (oui, vous aurez les chansons françaises parisiennes sur la VFQ !), pareil pour le doublage d’Abuela.
Pour résumer : le bluray français nous apparaît comme indispensable pour les personnes préférant avoir la VF parisienne et les sous-titres français sur les bonus. L’UHD quant à lui est à conseiller pour les amoureux de home cinema. Et si vous n’êtes pas réfractaires à la VFQ (excellente). Les sous-titres VFQ sur l’UHD sont de qualité également. En revanche il n’y a pas de bonus sur le disque 4K. Si vous achetez l’UHD en import, vous trouverez les bonus sur le bluray vendu avec le disque 4K. Sur l’import US, le bluray possède une VFQ, sur l’import UK - et même si l’UHD a bien une version française québécoise - le bluray ne possède pas de VF ni de sous-titres français.
En Blu-Ray, DVD et steelbook ainsi qu'en VOD depuis le 1er avril 2022, et en achat digital depuis le 24 mars 2022.
Titre original |
Encanto |
Date de sortie en salles |
24 novembre 2021 avec Walt Disney Company France |
Date de sortie en vidéo |
1er avril 2022 avec Disney Video |
Date de sortie en VOD |
1er avril 2022 avec Disney Video |
Réalisation |
Byron Howard, Jared Bush & Charise Castro Smith |
Distribution |
VO : Stephanie Beatriz, María Cecilia Botero, John Leguizamo, Mauro Castillo, Jessica Darrow, Angie Cepeda & Carolina Gaitan ; VF : Camille Timmermann, José Garcia & Juan Arbelaez |
Scénario |
Byron Howard, Jared Bush, Charise Castro Smith, Jason Hand, Nancy Kruse & Lin-Manuel Miranda |
Photographie |
Alessandro Jacomini, Nathan Warner & Daniel Rice |
Musique |
Germaine Franco & Lin-Manuel Miranda |
Support & durée |
Blu-ray Disney (2022) region B en 1.85:1 / 102 min |
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