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Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.

Ce qui a commencé doit finir

Matrix Revolutions

 

Un film des frères Wachowski (2004) avec Keanu Reeves, Laurence Fishburne, Carrie Anne Moss

 

Synopsis CommeauCinéma : Lorsque MATRIX RELOADED s'achève sans nous livrer toutes ses clés, Neo (Keanu Reeves) a franchi un pas de plus dans sa quête pour la vérité. Une quête initiatique entamée avec son voyage dans le monde réel au début de MATRIX, mais qui a privé Neo de ses pouvoirs et l'a condamné à errer dans un no man's land entre la Matrice et le Monde des Machines. Tandis que Trinity (Carrie-anne Moss) veille sur Neo, plongé dans le coma, Morpheus voit tous ses espoirs s'effondrer en apprenant que l'Elu n'est en fait qu'une invention de plus des architectes de la Matrice pour maintenir leur contrôle sur les humains.

 

A la suite du 2e volet, cet épisode récupère un potentiel qui s’était dissipé, compte tenu des attentes des fans profondément déçus par Matrix reloaded. Bon, il y a toujours les trucs qui fâchent comme ces discours vaguement philosophiques sur le choix et le destin, où les interlocuteurs posent plus de questions qu’ils n’y répondent, mais ils sont  heureusement plus courts – il n’empêche que l’explication du changement d’apparence de l’Oracle est fumeuse et il ne fait pas bon chercher à s’y attacher. Trop de choses restent en suspens (notamment sur Séraph dont le passé mériterait une saga à lui tout seul) d’autant que cette fois le métrage décide enfin de se concentrer sur deux axes : la bataille de Zion et la quête de Neo. Il était presque temps, mais cela a permis de dévoiler certains pans de l’univers dans lequel évoluent nos héros – humains, simulacres ou programmes rebelles échappant au grand ordonnateur.

 

Ces deux parties sont montées de façon habile, les séquences les plus haletantes n’étant pas coupées et l’alternance s’effectuant assez harmonieusement. On a droit à notre lot de scènes tumultueuses, où se mêlent l’héroïsme et le désespoir dans des situations déjà vues (le vieux briscard qui passe la main et le jeune illuminé qui reprend le flambeau). La partie que joue Neo est plus décevante et, si le combat final a toutes les allures du titanesque – reprenant des codes directement issus des affrontements de super-héros marvelliens ou des combats de personnages de manga, il ne parvient pas à s’ajuster à la hauteur des enjeux ; toutefois, les ondes de choc se répercutant sur les gouttes de pluie sont hallucinantes et valent à elles seules le visionnage. En effet, malgré la recherche d’un habillage pseudo-philosophique, qui au pire noie le spectateur – et au mieux le déroute, c’est tout l’aspect visuel qui retient notre attention : Matrix réapparaît comme la vitrine d’une synthèse habile de plusieurs tendances culturelles et artistiques.

Sous ces auspices, le sacrifice de Neo est d’autant plus amer que l’homme libéré de la fin du premier Matrix semble s’être perdu sous les responsabilités, n’étant au final qu’un pauvre pantin aux pouvoirs dépassant ses propres capacités – comme Ramiel le glissait dans un commentaire sur le précédent film, on s’attendait pourtant à tout autre chose, et en tout cas à une évolution positive. La conclusion laisse donc un goût amer.

 

Néanmoins, le spectacle est là, je me suis surpris à ne pas m’ennuyer : bien qu’ayant perdu le côté simplement jouissif du premier opus, il y avait suffisamment de matière pour l’entertainment. La saga dans son ensemble est une réussite parcellée de suffisance, mais qui a permis à de véritables artistes de se livrer à la concrétisation de fantasmes hallucinatoires dans lesquels la virtuosité le dispute à la maîtrise technique. Savoir que des gens comme Watanabe (Cowboy Bebop, Samuraï Champloo) font partie de la distribution des Animatrix est clairement stimulant. On laissera de côté le jeu vidéo PC, raté dans sa réalisation mais offrant encore d’autres facettes de l’univers entrevu et je vous laisse de soin de lire la chronique de Neault sur le Matrix comics qui vient de paraître.

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R
Oui, les formules laconiques sur la vie intérieure, dans le goût de Lao-Tseu, ont souvent plus de force, notamment dans un récit, et qui plus est un récit filmé, que les longs développements spéculatifs hérités de la théologie occidentale, ou de la métaphysique traditionnelle. Ces formules se placent dans le rythme, tandis que les dissertations le rompent : tu as tout à fait raison, Vance. Or, le rythme du premier volet, c'est une de ses grandes forces : on allait de surprise en surprise. C'était rythmé comme un rituel kung-fu. Ensuite, le sens du rythme a un peu manqué.
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V
Merci vous deux. Pour la taille de la police, je crois que c'est fonction du navigateur et de l'état du réseau : bref, ça arrive et ce n'est pas grave.Ce n'est pas la 1e fois qu'un acteur décède sur un tournage et j'ai déjà vu de meilleures façons de continuer le spectacle sans laisser apparaître des scénarios cousus de fil blanc. Oui, je trouve le combat final un peu décevant, jubilatoire par l'opposition de forces phénoménales mais frustrant du fait justement de l'étalage de cette puissance. C'est un peu comme dans la saga Dragonball (dont l'image a souvent été employée pour la comparer aux combats Smith/Neo) : c'était passionnant jusqu'à l'arrivée des Super Saïens. Ensuite, les personnages sont tellement puissants (Vegeta était déjà capable de faire sauter une planète) qu'on évalue mal le rapport de forces : il ne s'agit ensuite qu'une sorte de course à l'armement, à celui qui aura la plus grosse (énergie). Remarque : je mentirais si je n'avouais pas ressentir un plaisir un peu coupable, et attendu depuis ce fantastique plan où Neo accumule ses forces afin de voler à la rescousse de sa bien-aimée, dans Reloaded. Je me suis peut-être mal exprimé, mais s'il y a bien une pensée inhérente à la saga, les verbiages inconsistants que sont les dialogues des deux derniers films ressemblent davantage à de la poudre aux yeux ponctuée de bons mots qu'à un réel discours faisant du sens. Le premier film préférait s'appuyer sur des phrases courtes comme autant de doctrines (moins proches de la philosophie telle qu'on la conçoit dans notre société judéo-chrétienne que d'une sapience orientale fondée sur la sagesse et l'observation de l'équilibre des forces naturelles) plutôt que des sophismes lourds et pompeux. J'y vois surtout une volonté contre-nature de donner plus de profondeur (et donc de justification ?) à une oeuvre qui n'en avait pas besoin : je préfère mille fois des phrases concises telles que "Il y a une différence entre connaître le chemin et arpenter le chemin" à ces leçons professées sur un ton docte entre deux combats. En revanche, personnellement, j'appréciais les thèmes véhiculés dans ces diatribes (qui renvoyaient à de nombreuses références SF de Gibson à John Brunner) : c'est juste qu'ils collaient mal au rythme propre du film.Cela dit, il est certain que l'impact visuel était énorme. J'envisage de me repasser la saga au complet (c'est à dire avec les Animatrix) à nouveau dans quelques temps et je suis sûr d'avoir encore des trucs à rajouter.
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R
Je suis plutôt d'accord avec Vance qu'avec Neault, comme le premier le laissait entendre. Je dirai que le 3e volet, comme le second, donne surtout l'occasion aux réalisateurs de montrer leur incroyable capacité à l'art visuel. J'irai même jusqu'à dire que les idées en arrière-plan sont au fond des occasions, voire des prétextes à cette démonstration qui est celle, au fond, de peintres qui maîtrisent les techniques modernes de l'image. Démonstration en soi très convaincante.Cela dit, je reste sceptique, quant à la capacité de ces grands artistes visuels à créer une intrigue toujours réellement intéressante. On a le sentiment que dans le n° 1, ils ont repris des schémas narratifs classiques, et qu'ils se sont dit que dans les deux suivants, ils feraient ce qu'ils voudraient, et que, du coup, c'est un peu désordonné. J'ai personnellement le sentiment d'une suite plus ou moins bien enchaînée de motifs déjà lus ou vus ailleurs, en soi fascinants, surtout par leurs conséquences visuelles à l'écran, mais dont le sens profond n'est pas réellement en phase avec l'évolution du récit, avec la progression dramatique, pour ainsi dire. En théorie, bien sûr, cela évolue correctement, mais c'est sans cesse arrêté par des motifs qui se posent comme de profondes énigmes, et qui très souvent sentent leur déjà vu : c'est un bug de la matrice intellectuelle, pour ainsi dire.La question de la mécanique et de la liberté n'est pas réellement nouvelle, ni réellement confinée dans des cercles restreints, à mon avis. Chacun a bien son idée là-dessus. Les uns pensent que l'homme est plutôt libre, les autres qu'il en a surtout l'illusion. Ce qui est un peu bizarre, c'est qu'il n'existe au fond qu'un seul monde, et que la nature de l'être humain ne peut pas changer en fonction des circonstances. La complexité ici confine à l'incohérence. Dire que la liberté est à la fois réelle et illusoire, ce n'est pas forcément faire preuve d'esprit dialectique, mais est surtout  la marque d'esprits fantasques et contradictoires. A mon avis, les frères W. ont surtout voulu dire qu'eux étaient libres de créer les belles images qu'ils voulaient, même si cette liberté était secrètement conditionnée par leur mécanique interne : la preuve en est que quand ils posaient l'être humain comme libre, ils se sentaient obligés de le faire à cause de la doxa américaine. Asimov lui-même admettait à la base cette liberté humaine : c'est la marque de son humanisme, la vraie part de mystère aqui est au fond de l'action humaine, au-delà des lois qui président à la matière et à ses mouvements.Cela dit, ce n° 3 est magistral par ses images, il faut l'admettre.
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N
Merci pour le lien Vance. ;o)Pour ce qui est de ta chronique, bon, je ne suis pas d'accord du tout (mais ce n'est pas surprenant lol).Alors, je commence par le début :"il n’empêche que l’explication du changement d’apparence de l’Oracle est fumeuse"--> l'actrice est décédée avant d'avoir pu terminer de tourner les scènes de Revolutions, on ne peut pas lui en tenir rigueur, encore que cela dénote un manque de professionnalisme navrant. ;o)"si le combat final a toutes les allures du titanesque – reprenant des codes directement issus des affrontements de super-héros marvelliens ou des combats de personnages de manga, il ne parvient pas à s’ajuster à la hauteur des enjeux"--> Ah ben mince, le combat final n'est pas à la hauteur ? Tu es bien difficile !! Il est sublime cet affrontement au contraire. Et en plus, il parvient à nous passionner (alors qu'en général je m'ennuie ferme au cinéma dans ce genre de scène). C'est sombre, apocalyptique, lyrique, atrocement beau, bref, c'est ce que j'ai toujours imaginé en voyant des images figées (dans les comics notamment, tu as raison) qui est retranscrit d'une manière hallucinante sur écran."d’un habillage pseudo-philosophique"--> Mais pourquoi "pseudo" philosophique ? Il y a un réel fond philosophique dans Matrix, n'en déplaise à ceux qui souhaiteraient conserver la réflexion dans des livres poussiéreux, bien à l'abri des gens peu sérieux qui osent rendre accessible ce qui, naguère, était le domaine réservé d'une sinistre caste.A ce sujet, hop, un coup d'oeil sur ce site, créé par un prof de philo de Soissons, qui se sert justement du film (le premier seulement je crois) pour enseigner autrement :http://pedagogie.ac-amiens.fr/philosophie/sujets/matrix.htmEt d'ailleurs, j'ajoute, à partir du moment où l'on parle de pseudo-philosophie, c'est qu'il y aurait donc une pseudo-réflexion ? Qu'est-ce qui la différencie de la "véritable" réflexion alors ? Y aurait-il une noblesse de la pensée ? Je ne le crois pas."on s’attendait pourtant à tout autre chose, et en tout cas à une évolution positive. La conclusion laisse donc un goût amer. "--> L'absence d'happy end renforce justement le côté dramatique. Il ne s'agit pas d'une histoire à la "superman" mais bien d'une saga complexe et subtile dans laquelle tout n'évolue pas naturellement vers le rose. D'ailleurs, même les interrogations laissées par les monologues "explicatifs" (de l'architecte par exemple) rendent compte d'un certain réalisme. Dans notre monde non plus, l'on ne comprend pas tout. Ni son fonctionnement propre ni nos motivations profondes même souvent."La saga dans son ensemble est une réussite parcellée de suffisance"--> L'ambition n'est pas forcément le signe d'une suffisance. La saga place la barre haute et défriche un nouveau genre, c'est le seul reproche qu'on peut lui faire."Savoir que des gens comme Watanabe (Cowboy Bebop, Samuraï Champloo) font partie de la distribution des Animatrix est clairement stimulant"--> Exact ! D'ailleurs, moi qui n'aime pas trop les DA en général, j'ai été emballé par les Animatrix. Certains, comme The Second Renaissance, livrent des clés absentes des films, d'autres, plus nombreux, sont des moments d'émotion pure voire de franche poésie.Bref, j'ai plutôt bien aimé moi.;o))ps : à un moment, la taille de la police change, on a l'impression que je hurle, lol, désolé, ce n'est pas volontaire et je n'arrive pas à changer ce binz.
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