Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.

les Indestructibles : incontournable !

les Indestructibles : incontournable !
Les Indestructibles

Ralala. Depuis le temps que j'attendais cela, j'avais fini par oublier que je l'attendais.


Car contrairement aux autres productions Pixar, je n'y suis pas allé en sachant que c'était une réussite. Même peu de temps avant, quand je m'étais rendu pour assister à la séance de Ratatouille, j’avais à l’esprit la marque de fabrique, cette garantie de qualité qui auréole la société Pixar depuis Toy Story et qui ne s’est jamais permis la moindre fausse note - bien que l'on puisse raisonnablement constater une certaine complaisance avec Monstres Academy. Certes, chaque spectateur a son Pixar préféré et celui qu’il apprécie moins, mais le fait est que la firme a trouvé cet équilibre miraculeux entre le récit initiatique propre aux contes pour enfants – et donc aux films de Disney -, la maîtrise inouïe de la structure narrative, des personnages attachants et toujours dépeints avec tendresse et malice et un savoir-faire pour le rendu visuel qui n’a rien de l'esbroufe trop souvent mise en avant par les sociétés concurrentes. 

En fait, l’expérience Cars a fini de m’ôter les quelques rares doutes qui me restaient (je ne suis pas un grand fan de Nemo, néanmoins) : ce pitch improbable de voitures animées s’était révélé être une réussite de plus à l’actif de la bande à Lasseter. Mais revenons à nos Incredibles, puisqu’il s’agit d’eux aujourd’hui.


Etape 1 : la bande annonce. Si elle met en avant certaines références (les costumes, le design très "Futuropolis" ou l'an 2000 vu depuis les années 50), elle augure d'un film plutôt cartoonesque, débordant de gags et d'inventivité visuelle, pas trop m'as-tu-vu mais suffisamment bien réalisé pour en remontrer à ceux qui voudraient cracher dans la soupe Pixar. Un film destiné aux enfants, susceptible d'intéresser les ados et de ravir les parents. Un film Disney quoi. De quoi faire trembler quelques esprits aigris.


Etape 2 : les premières critiques dans la presse papier. Passage obligé, histoire de prendre la température. Du positif, du positif, mais pas le débordement de joie et d'émotions qui avait suivi la projection de Toy Story 2, demeurant encore pour beaucoup la référence ultime dans la synergie entre animation 3D et scénario malin et subtil.


Etape 3 : les premiers commentaires sur les forums. Un Pixar adulte ? Un Pixar moins drôle, plus axé sur la réflexion et l'introspection ? Bien. Ca m'intéresse, ça. Mais ça m'interpelle aussi. En s’adressant plus directement aux adultes, Pixar y laissera-t-il un peu de son âme ?


Ah, fol que j'étais, homme de peu de foi !


Car c'est une véritable réussite ! Ce film est une pure merveille, quelque chose de précieux et de neuf qui me parle, qui s'adresse à chaque parcelle de ce que je suis. C'est la concrétisation de décennies d'une culture super-héroïque développée à tâtons au travers de petits magazines qui ont traversé les années de guerre, c'est l'aboutissement d'une grande part de ce qui a fait les comics anglo-saxons des 50 dernières années, c'est le point d'orgue apporté à plusieurs générations qui ont reporté leurs espoirs dans quelque chose d'utopique et de tellement proche d'eux, finalement, à ces nouveaux dieux forgés par les hommes, puis ignorés, rejetés avant d'être réadoptés, pour le meilleur et pour le pire.


Tout y est. Jusqu'à ce commentaire vers la fin, lorsque deux vieux se félicitent de la tournure qu'ont pris les événements en parlant du bon vieux temps (ou quelque chose approchant).


C'est sûr, ceux qui ne connaissent les super-héros DC que de la période post-Crisis ou les Marvel d'après la mort de Gwen Stacy (voire de Jean Grey) risquent de ne pas s'y retrouver, hésitant entre les références aux séries TV qui nous font maintenant rire tant elles étaient niaises (les premiers Batman et Superman) et les compromis stylistiques dignes de Sky Captain & the World of Tomorrow. Mais ceux qui ont connu, ou se sont replongé dans les prémisses de nos comics actuels, aidés en cela par une vague de rééditions des séries cultes d'après-guerre, ceux-là se délecteront : on a l'impression d'évoluer en terrain connu, cette sensation de familiarité, de déjà-vu. Et pourtant, aucune redite, aucun plagiat de situations : c'est l'ensemble qui nous laisse cette sensation, comme celle qu'on peut éprouver en regardant un bon vieil épisode de Star Trek The Original Series.

 
Ce que le cinéma n'a pas pu (ou pas su) faire - le Superman de Richard Donner, bien meilleur que ce que d'aucuns ont pu penser, n'est pas une bonne adaptation, non plus que les Batman de Burton, même s'ils sont d'excellents produits cinéma - Pixar a su le réaliser, avec brio. C'est même parfois trop, tellement on a l'impression qu'ils y ont mis tout ce qu'ils avaient sous le coude depuis des années. Intégration, droit à la différence, rédemption viennent ici côtoyer avec bonheur les valeurs habituelles prônées par Disney et ses filiales, le sens de la famille et la reconnaissance de l'individu au sein de la société.


Les personnages sont attachants et les situations tellement évidentes, tellement familières : ôtez les super-pouvoirs, et vous êtes devant une comédie dramatique habile, jamais niaise, jouant sur les rapports humains avec légèreté mais pas frivolité. C'est long, mais pas trop long, c'est même riche - et si certains esprits frileux ont pu penser que cela pouvait dérouter les plus jeunes, il n'en est rien comme j'ai pu le constater avec mes neveux. Allez, ils y trouveront tout de même assez de séquences fortes et de scènes à sensations pour en ressortir béats d’admiration et emplis de reconnaissance (notez que je ne touche aucun droit sur la vente ou la location de vidéos Pixar).


Plus proche de l'esprit des Toy Story que de Nemo ou Ratatouille, plus caustique, plus mûr, plus incisif aussi, mais sans jamais jouer dans le scabreux ou le lourd, les Indestructibles repose sur un humour omniprésent, évoluant davantage par petites touches que par gros éclats de rire. Certaines séquences sont hallucinantes et jouissives (le run de Flèche sur le lagon est une pure merveille graphique).

 
Bien sûr, cela n'a pas ce sens du spectaculaire et cette gravité qu'on peut trouver dans les rares réussites du genre (comme les X-Men de Singer), mais on est face à l'improbable rencontre de Pleasantville et Toy Story, avec un soupçon de Disney première époque, ou quand Lasseter et son équipe nous refont le coup de Alex Ross et Kurt Busiek pour Marvels, mais à destination des plus jeunes... Sans se faire envahir par la nostalgie, on met en avant des références du passé afin de mieux construire un avenir moins serein qu’il n’y paraît : la mort est présente dans ce film, mais aussi l’incertitude, le doute, et tous les problèmes que peuvent rencontrer les membres d’une famille lambda.


Un plaisir énorme, sans faille, sans baisse de rythme et sans cesse renouvelé. C'est comme d'être dans le Space Mountain et de ne plus redescendre, repartir à chaque fois qu'on arrive. C'est beau, c'est simple. Plusieurs rediffusions sur tous les supports n’ont en rien ôté ce plaisir ineffable d’avoir trouvé un chef-d'oeuvre du cinéma qui correspond à de secrètes attentes : Brad Bird a concçu une véritable pépite qui lui a permis de confirmer sa place dans la cour des grands.


Que du bonheur, donc.

  

Titre original

The Incredibles

Mise en scène 

Brad Bird

Date de sortie

24 novembre 2004 avec Buena Vista International

Scénario 

Brad Bird

Distribution 

Les voix originales de Holly Hunter, Craig T. Nelson & Samuel L. Jackson ; la voix française de Bruno  Salomone

Photographie

 

Musique

Michael Giacchino

Support & durée

Blu-ray Disney Pixar (2011) region B en 2.35 :1 / 123 minutes

 

Synopsis : Super-héros à la retraite, Bob et Hélène Paar (ex-Mr. Indestructible et ex-Elastigirl) mènent une vie insipide et presque ordinaire avec leurs trois enfants, Violette, Flèche et Jack-Jack. Convié sur une île pour une mission secrète, Bob saisit l'occasion pour enfiler de nouveau sa combinaison en latex.  

Retour à l'accueil
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
B
entièrement d'accord, que du bonheur celui-là ! Certains Pixar sortent vraiment du lot, ce film ci en fait partie, c'est un vrai régal non stop !
Répondre
T
L'importance visuelle du costume est également clairement et fortement mise en scène dans les adaptations animées de Bruce Timm : depuis le felinité de la série Batman de 1992 jusqu'à l'iconicité presque outrancière de Justice League Unlimited.
Répondre
R
Ah, oui, en fait, je les ai lus, les albums de Watchmen : j'avais oublié leur nom. C'est vrai que c'était sublime. Et c'est parfaitement exact qu'on en trouve plusieurs échos dans les Indestructibles. Je pense, d'ailleurs, que c'était un bon choix, que, peut-être, les autres films de super-hérs auraient dû le suivre. A mon avis, il y a quelque chose de cela, dans les Batman de Burton.Sinon, j'ai trouvé que la dimension mythologique et la couleur verte de Hulk étaient bien rendus dans le film de Ang Lee, qui est comme un dessin animé, pour les parties appartenant à la fable. Et j'ai trouvé que le costume et l'esthétique de Elektra étaient sublimes, et que Matrix avait bien nourri l'inspiration du réalisateur. J'ai fait un article sur Elektra (sur mon blog).
Répondre
V
Pour le sWatchmen, je t'invite à lire cette modeste chronique (http://journal-de-vance.over-blog.com/article-5745605.html . Honnêtement, c'est incontournable.Sinon, j'aime beaucoup cette thèse. J'ai été assez déçu par l'absence de Galactus en tant que personnage concret dans le film, d'autant que le look imaginé par Jack Kirby était une réussite totale.
Répondre
R
Je ne connais pas Watchmen. Mais je pense vraiment que le costume est fondamental : même dans Matrix et V for Vendetta, est-ce que ce n'est pas net ? Le génie des frères Wachowski est de l'avoir compris, et d'avoir compris, aussi, que le cinéma était d'abord un art visuel. Lynch même a dessiné et redessiné sans fin le costume des Fremen, dans Dune : pour lui, c'était également fondamental.Je viens de voir Les 4 Fantastiques et le Surfeur d'Argent : les costumes des héros, qui d'ailleurs font débat, au début, ne sont pas mal ; ils sont d'un beau bleu. La couleur du Surfeur d'Argent n'est pas mauvaise non plus ; elle aurait pu être d'un blanc plus clair, plus net. Mais ce qui n'allait pas, c'était qu'on était privé de vision concrète, pour l'entité Galactus : le dieu en armure de la bande dessinée est remplacé par un nuage de feu. Le réalisme qu'apparemment nécessite le cinéma a encore nui à la poésie de la bande dessinée, à mon avis. Je crois que la poésie des Marvel Comics était largement due à l'aspect purement visuel, aux vives couleurs, dans des dessins nets, comme dans de l'art médiéval. C'était une esthétique qui n'est pas toujours bien rendue.
Répondre
V
Thèse très intéressante que celle d'associer le concept au costume. On en trouve quelques aléas dans le génialissime Watchmen et la question s'est posée lorsque Joss Whedon a repris une série X-Men (en tant que scénariste de comics) et qu'il a décidé de redonner aux personnages leurs anciens costumes. Merci beaucoup pour ces ouvertures.
Répondre
R
(J'ajoute qu'une des forces des Indestructibles est précisément d'avoir su restituer la thématique majeure, et puissamment symbolique, du costume, au sein de l'intrigue même.)
Répondre
R
Les autres adaptations des livres de Robert E. Howard (y compris le second Conan) sont du reste toutes ratées. Mais des films comme L'Epée sauvage et Dar l'Invincible imitaient Howard, et n'étaient pas absolument mauvais. Le film de Milius bénéficia d'un scénario d'Oliver Stone, et était encore proche de l'époque où Milius même écrivit celui d'Apocalypse Now ! De ce dernier film, je reparlerai, un de ces jours, sur mon blog.Superman Returns a le défaut, pour moi, d'être dans la grisaille, et de n'avoir pas su restituer le charme des costumes colorés des super-héros. A vrai dire, c'est une mode : les adaptations des X-Men et de Spiderman sont pareilles. Mais ces costumes étaient fondamentaux : ils ne sont pas du tout annexes, comme on le croit. Ils constituent la nature par essence merveilleuse des super-héros. Un super-héros en costume coloré ne peut pas faire quelque chose d'anodin. Les seuls costumes réussis, en dehors de celui du film de Donner, sont ceux de Batman, tant chez Burton que chez Nolan. Le costume d'un super-héros est pour moi aussi important que la forme du monstre dessiné par Giger, dans Alien : le cinéma est un art visuel (comme la bande dessinée) : pas conceptuel.Cela dit, dans Superman Returns, j'ai bien aimé le lien entre Superman et le soleil, manifesté par une séquence assez prodigieuse, comparable à celle qui plaçait, dans le premier Batman de Burton, l'aile volante du héros dans l'orbe lunaire : les héros sont forcément liés aux astres, ils tirent forcément d'eux leur force.
Répondre
V
Justement, Superman returns s'est positionné comme un hommage à l'adaptation de Richard Donner te se voit ainsi qavec jubilation - seul le casting pose problème.Rien à rajouter sur Conan, qui est un de mes films préférés, avec des séquences d'anthologie et une des plus belles bandes originales jamais conçues. On est pourtant assez loin du personnage créé par Ron Howard, voire même de celui que les lecteurs de Marvel ont vu sous le crayon de Roy Thomas et les pinceaux de John Buscema : ce qui prouve qu'une bonne adaptation n'est pas la lus fidèle, mais celle qui respecte le concept tout en cherchant à le recréer pour le nouveau support.Incassable de Shyamalan est une réussite absolue, pourtant très loin du bruit et de la fureur des films de super-héros.
Répondre
R
Ah ? Je ne l'ai pas vu.Je ne suis pas un grand admirateur des adaptations de Spiderman et des X-Men ; je les trouve un peu convenues. Pareil pour la dernière adaptation de Superman. L'ancienne avait en fait beaucoup de charme. Les couleurs, un certain état d'esprit de l'Amérique triomphante et civilisatrice, ou libératrice, la grande époque, un kitsch finalement délicieux, par endroits, les cristaux, les pierres luisantes, le pathétique sentimental, c'était joli.Sinon, une adaptation d'un personnage présenté en bande dessinée par Marvel Comics que je prends pour un chef-d'oeuvre, c'est Conan le Barbare  de John Milius. Mais le pmlus beau film de super-héros, c'est réellement Les Indestructibles !
Répondre