Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
Comic book en 7 volets de Mark Millar et Steve McNiven, édition kiosque Ó Panini Marvel France juin 2007
Après l’application de la Loi de Recensement des Surhommes, les super-héros se retrouvent divisés en trois camps : les partisans de la Loi, qui recherchent avant tout à ne pas entrer en conflit avec le gouvernement et à épargner les peines qui découleraient d’une vaine résistance ; ceux-là se rassemblent derrière Iron Man et Red Richards. En face, les rebelles, qui au nom de la liberté et de l’équité refusent de s’engager, de dévoiler leur identité et de mettre ainsi en danger leurs proches ; ils sont plus nombreux, avec Captain America en chef de file. Et puis il y a ceux qui hésitent encore (les autres Fantastiques) ainsi que ceux qui préfèrent la neutralité provisoire (les X-Men). Cette fois, la guerre est véritablement engagée, avec ses quartiers généraux, ses alliances fragiles, ses traîtrises : Iron Man ne recule devant rien pour faire plier la volonté des réfractaires, ce qui a tendance à faire grincer des dents chez des alliés comme Spider-Man ou Ben Grimm. Dans le précédent épisode, ils ont réussi à les faire venir sur un prétendu lieu de détention de super-humains, afin de mieux les piéger. Alors que chaque camp semblait avoir usé d’une botte secrète, voilà que survient aux côtés des loyalistes Thor, que tout le monde croyait mort, et qui pourrait bien mettre un terme définitif au conflit. Pendant ce temps, Speedball, malgré les efforts de son avocate Jennifer Walters, est en passe d’être envoyé en détention, dans un lieu secret où il découvrira l’ampleur du programme mis en place par Tony Stark pour les rebelles. Et c’est Wonder Man qui prend en charge la filature de ce que le SHIELD considère être un agent dormant – mais pour le compte de qui ?
L’épisode d’aujourd’hui est particulier en ce sens qu’il demeure centré sur un combat dantesque où l’usage de forces de plus en plus terrifiantes finit par faire une victime – et ce drame, auquel personne ne croyait, risque bien de changer la donne pour la suite de la Guerre Civile. On connaissait les héros qui ne s’étaient engagés aux côtés d’Iron Man que parce qu’ils croyaient en la vertu de la Loi et étaient aveuglés par leur fidélité aux valeurs gouvernementales : mais à présent qu’un de leurs anciens partenaires est mort, comment vont-ils réagir ? Si les atermoiements de Spider-Man sont plutôt développés dans sa propre série (remarquable en ce moment), ceux des FF donnent lieu à un dénouement inhabituel et poignant. Mais en face, les « autres » ne sont pas en reste : le combat n’est-il pas perdu d’avance ? S’enregistrer n’est-il pas la meilleure solution ? Cap America n’est-il pas aveuglé par son opposition farouche à ce qu’il estime être un acte inique ? Les jugements de chacun sont mis à rude épreuve, les loyautés également.
Au travers d’une mise en scène inspirée, avec des cadrages saisissants de Steve McNiven – qui décidément séduit par son utilisation redoutable de contre-plongées et de gros plans signifiants – on est emporté dans la tourmente Civil War avec délices et passion. Millar sait parfaitement nous captiver en jouant habilement sur les mystères et secrets d’Etat, les retournements, les décisions radicales et les prises de conscience tardives. Au vu de la façon dont les événements s’enchaînent, on est en droit de se poser des questions sur la manière dont les personnages principaux réagissent, mais on est surtout effaré par les implications qu’auront certaines initiatives. Sans être véritablement transgressif, on est en plein dans ce goût du spectaculaire qui plaît tant dans la série Ultimates : plein la vue, et encore plus, mais avec style. Violent sans être bourrin, malin sans être véritablement subtil, profond sans être réellement complexe. 4e épisode, et l’escalade atteint des sommets qui nous font nous demander : « Jusqu’où n’iront-ils pas ? ».
Frontline n’est pas en reste, surtout le très bon the Accused où
Speedball explore les dessous de l’histoire. Honni par une opinion publique vindicative, malmené par ses codétenus, il affiche un étonnant sens de la dérision et une résistance incroyable :
bref, de gamin irresponsable et un peu suffisant, il est en passe de devenir un homme qui s’ébahit de voir tant de cruauté et d’étroitesse
d’esprit dans une population qui ne cherche que des boucs émissaires. Et il sera le témoin privilégié des proportions insoupçonnées que prend
cette Guerre Civile, jusqu’à une mascarade qui fera écho à une autre ayant marqué l’inconscient collectif. Sleeper Cell est moins convaincant, en raison d’une histoire nébuleuse et de dessins médiocres, mais elle a l’avantage de renvoyer à ceux qui sont partis en
chasse du véritable coupable de l’explosion de Stamford (dans la série Wolverine).
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