Trap

Il est de bon ton de se foutre de la gueule de Shyamalan aujourd’hui, comme si pour être un « bon » cinéphile il fallait, à cause de quelques ratés, impérativement renier la filmographie d’un artiste que tout le monde ou presque encensait il y a 20 ans. Pourtant, le réalisateur - malgré donc quelques choix discutables - n’a jamais perdu de son talent, et même ses films les plus maladroits ont toujours gardé un minimum d’intérêt, que ce soit en matière de mise en scène ou d’ambition. Et s’il n’a jamais réitéré l’exploit d’enchaîner les chefs-d’œuvres « sérieux » de son début de carrière, son retour récent à de plus modestes productions lui aura permis de tester tout un tas de concepts originaux avec plus ou moins de succès.

Ses derniers essais n’étaient pas des plus convaincants (Old, Knock At The Cabin), la faute à des éléments venant systématiquement parasiter le résultat final (notamment en ce qui concerne les résolutions des intrigues), mais l’on ne pouvait nier l’impressionnant savoir-faire technique derrière. Trap est dans la mouvance des films suscités, cependant il s’avère nettement mieux construit scénaristiquement et thématiquement. Il y a du Hitchcock et du Kubrick dans le ludisme de l’entreprise, toutes proportions gardées, avec une mise en scène qui allie avec une déconcertante limpidité la forme et le fond : Trap est particulièrement fun au premier degré, mais il s’avère surtout « captivant » quand on essaie de comprendre ce qui a bien pu motiver Shyamalan à écrire cette histoire.

Le spectateur n’est jamais passif devant ce film, se questionnant constamment sur sa morale (comment est-il possible de jubiler à ce point devant les ingéniosités développées par un serial killer pour ne pas se faire arrêter ?) mais également sur ce que sous-entend le réalisateur sur la paternité. Vertigineux lorsque l’on capte que l’une de ses propres filles y joue un rôle majeur (et qu’elle le fait hyper bien en plus), le film joue continuellement à brouiller les pistes : est-il une comédie satirique over-the-top (un psychopathe qui joue à Tom Et Jerry avec la police ?) ou un thriller sombre dans lequel nous ne devrions pas avoir d’empathie pour le protagoniste ? On se retrouve en réalité à l’exacte place de sa fille. C’est très intelligent ! Le mélange des genres est habile, car déstabilisant. Les comédiens sont ainsi au diapason, et Josh Harnett parvient tour à tour à être charmant, inquiétant, pathétique et hilarant. Bravo ! On aurait peut-être aimé un métrage plus marquant, plus signifiant, toutefois c’est un super moment de cinéma qui tente des trucs.

L’UHD édité par Warner est irréprochable d’un point de vue technique. L’image y est particulièrement précise (DI 4K), le HDR apporte une plus-value non négligeable, aucun défaut d’encodage à signaler. La VO Dolby Atmos est hyper immersive, concert oblige, avec des basses bien rondes et des effets directionnels bien utilisés pour plonger au cœur de l’action. Rien à reprocher, ce n’est certes pas le disque le plus impressionnant en vente actuellement mais il est quasi parfait dans sa manière de retranscrire le film tel qu’il est censé être.

Les bonus sont amusants (on y retrouve quelques images du tournage et des scènes inédites) quoiqu’un peu chiches.

Une chouette édition !