Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
Un film de John Carpenter (1976) avec Austin Stoker, Darwin Joston & Laurie Zimmer
Un DVD collector zone 2 distribué par Edito (1999), VOST DTS 5.1
88 minutes
L’histoire : Après une opération de police musclée, des membres d’un gang ont péri. Leurs chefs décident de les venger. Au cours de leur périple, ils abattent froidement une jeune fille. Aussitôt le père les prend en chasse et parvient à en descendre un. Mais il est contraint de se réfugier dans un commissariat sur le point d’être désaffecté où le seul officier en faction est obligé d’héberger un dangereux criminel au cours de son transfert.
A la nuit tombée, le bâtiment est pris d’assaut…
Si l’on peut établir une comparaison avec Cronenberg, c’est bien dans la recherche de l’efficacité. Carpenter n’est pas connu pour s’embarrasser avec des longues présentations et dépeint ses personnages à gros traits, se concentrant sur l’essentiel. Avec une durée de moins d’une heure et demi, Assaut s’avère être une référence en matière de rythme et d’intensité dramatique.
Le film a sa réputation. Au point qu’il a donné lieu à un remake officiel, signé Jean-François Richet en 2005, avec des moyens et une distribution qui semblent reléguer le premier du nom aux oubliettes. Pourtant, et comme bien souvent lorsque la surenchère tente de pallier à l’insuffisance de la mise en scène, le film de John Carpenter, celui par lequel il a définitivement inscrit son nom dans les mémoires des cinéphiles, demeure indétrônable.
Après s’être amusé avec les codes de la SF spatiale avec Dark Star, Carpenter signe ici une variation habile sur le mythique Rio Bravo : des membres des forces de l’ordre contraints de coopérer avec des criminels pour sauver leur peau face à d’autres hors-la-loi implacables. Pourtant, tant dans l’ambiance mortifère que dans l’utilisation d’une musique lancinante de son cru, le metteur en scène nous dévoile moins un western urbain qu’un film d’action qui lorgne vers le survival, voire le film de zombie. Comment ne pas en effet voir dans ce déferlement presque incessant de voyous au visage indéterminé harcelant les maigres défenses du commissariat une attaque massive de morts-vivants décérébrés ? Ils avancent presque sans bruit, muets, et ne cessent leur progression que pour mettre au point une nouvelle tactique pour investir les lieux. Ils défoncent les portes, escaladent les murs et tentent d’entrer par les fenêtres. Fauchés par les armes trouvées in extremis, ils tombent mais d’autres sont déjà derrière, et d’autres encore… L’officier et sa secrétaire voient progressivement le nombre de leurs collègues se réduire, au même titre que leur espérance de vie – et pour une raison qui leur échappe. Impossible d’appeler à l’aide : ils pourraient tout aussi bien être les derniers survivants après l’Apocalypse, cernés par des mutants sans âme… Alors, s’allier avec des criminels est le cadet de leurs soucis. Car survivre devient la priorité, et transcendera chacun d’eux.
Le film n’est pas exempt de défauts : l’interprétation est loin d’être à la hauteur (quoique, cette attitude hiératique et austère qui caractérise Laurie Zimmer lui confère un certain charisme, rehaussé par l’éclairage), les décors minimalistes (mais ils donnent une touche très particulière à ce lieu censé se situer en pleine ville mais perçu comme à l’écart du monde), les maquillages approximatifs et même les mouvements de caméra semblent plus sages que dans sa précédente réalisation ; toutefois Carpenter insuffle avec son montage (il en est le responsable sous un pseudonyme) et sa bande son devenue une référence une tension crescendo qui culmine dans un assaut massif nous rappelant les heures les plus prenantes de Resident Evil IV (je parle du jeu, bien sûr). Un budget serré, une efficacité maximale : Carpenter se ménage des plages de pause destinées à entretenir un suspense impressionnant. Evidemment, avec le recul, on s’aperçoit qu’on connaît toutes les ficelles du scénario : mais c’est que le film a plus de trente ans ! Dire qu’il a inspiré bon nombre de productions musclées est un euphémisme.
Assaut m’a donc raisonnablement surpris par sa maîtrise fondée sur une économie de moyens salutaire. Reste une question qui me tarabuste par rapport au titre anglais : on y parle du precinct 13 alors que l’essentiel de l’action se porte sur le commissariat 9, en passe d’être désaffecté (du moins est-ce le cas en VOST). Je me demande si je n’aurais pas loupé quelque chose…
Quoi qu’il en soit, et malgré quelques défauts qui font hurler les puristes (la version présentée dans ce DVD est recadrée en 1.78 :1, alors qu’il a été filmé en 2.35 :1), ce DVD restera dans ma médiathèque en tant que film de référence ; l’image est satisfaisante quoique accusant son âge, le DTS maladroit (le mixage est chaotique) mais puissant et les suppléments nombreux – dans un second disque bonus.
Pas mécontent du tout de l’avoir vu.
Les complétistes pourront lire l'excellent billet de Sékateur sur ce film, paru dans le cadre de ce Challenge.
Ma note : 4/5