Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
La version ciné de Miami Vice a longtemps été décriée, tant par le traitement des personnages qui ne cadrait pas avec celui de la série culte que par la manière dont Michael Mann amenait son intrigue. Sans être complètement rejeté, le film a souvent divisé les fans.
Ce fut le cas pour moi au cinéma, puis en vidéo : des sentiments mitigés. La première demi-heure m’a fait craindre le pire : malgré une étonnante maîtrise d’une caméra mouvante dans une boîte de nuit bondée, l’histoire avec l’indic qui voulait tout abandonner n’annonçait rien de bon. Au bout du compte, je me suis surpris à ne pas bâiller, ni soupirer : déjà ça de pris.
C’est que, si on excepte quelques scènes romantiques un peu artificielles, voire maladroites, il règne une tension certaine dans ce rapport de force permanent entre les deux flics et les commanditaires pour lesquels ils bossent en couverture. L’aspect purement policier est même carrément mis de côté (les taupes dans les services du FBI sont à peine mentionnées) pour privilégier l’enchaînement des événements et l’affrontement des caractères qui ne pouvaient conduire qu’au climax final, illustré par une fusillade monumentale où Mann fait preuve d’un sens du cadrage étonnant, exploitant chaque centimètre carré de l’écran ; le montage efficace, une bande son tonitruante et une excellente utilisation du champ/contrechamp ajoutent encore à cette sensation.
Le reste du film n’est somme toute valable que par une mise en avant de personnages qui s’avèrent, comme ça a été dit, très éloignés de ceux de la série : Crockett (Colin Farrell, au jeu atypique) est ici un roc inébranlable, un peu vantard, mais qui craque complètement pour Isabella (Gong Li, superbe) ; Tubbs est quant à lui interprété par un Jamie Foxx monolithique mais dégageant une impression de sérénité troublante – il m’a épaté. Derrière ce trio, pas grand chose à dire, les méchants ayant de bonnes têtes de méchants. J’aurais aimé voir davantage l’agent Fujima qui couvrait en sous-main nos deux flics. Dans la peau de Castillo, c’est l’excellent Barry Shabaka Henley que j’avais beaucoup aimé dans le Terminal et qui était déjà dans Collatéral.
Le doublage français au cinéma n’était pour une fois pas mauvais, les voix plutôt bien choisies, mais il manque de dynamique.
Pas beaucoup d’action, sinon, et on ne pourra même pas se reporter sur les bagnoles (on voit nettement plus de puissants hors-bords). Un peu d’exotisme, puisqu’on navigue entre l’Argentine et Cuba, mais sans vraiment profiter du paysage (sauf une vue aérienne sur les magnifiques chutes d’eau près desquelles réside Montoya). Bref, pas mal de frustrations mais également ce sentiment rafraîchissant de voir comment une organisation aussi rigoureuse et puissante que celle de Montoya finit par s’écrouler à cause d’une amourette. Le côté dénaturé des images (le chef opérateur est celui entre autres de Collateral, Equilibrium ou Mémoires d'une geisha)de cette caméra qui ne veut pas se poser peut dérouter, d’autant que c’est cadré très serré, comme pour mieux capturer ces êtres entraînés dans une histoire qui risque de leur échapper. Du coup, le final est inutilement positif et aurait dû laisser plus d’amertume.
Pas passionnant donc, parfois frustrant, mais très intéressant.
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Titre original |
Miami Vice |
Réalisation |
Michael Mann |
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Date de sortie |
16 août 2006 avec U.I.P. |
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Scénario |
Michael Mann |
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Distribution |
Colin Farrell, Jamie Foxx, Justin Theroux, Isaach de Bankolé & Gong Li |
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Photographie |
Dion Beebe |
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Musique |
Klaus Badelt, John Murphy & Jan Hammer |
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Support & durée |
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Synopsis : Miami... Deux agents fédéraux et la famille d'un informateur ont été sauvagement exécutés. Une nouvelle enquête commence pour Sonny Crockett et son coéquipier Ricardo Tubbs, avec une certitude : la fuite qui a permis ce massacre en règle provenait des sommets de la hiérarchie... Les deux inspecteurs découvrent rapidement que les tueurs étaient au service de la Fraternité Aryenne, organisation suprématiste liée à un réseau de trafiquants internationaux doté d'un système de protection ultrasophistiqué. Poursuivant leurs investigations, les deux partenaires prennent contact avec l'administratrice financière du cartel, Isabella, une Sinocubaine aussi experte en investissements et transferts de fonds qu'en blanchiment d'argent. La séduisante Isabella offre contre toute attente à Sonny une chance d'exorciser ses démons...