Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
De temps à autre, au milieu du tout venant de plus en plus formaté et décevant des films (dits) d’horreur, surgissent quelques pépites. The Descent en fait partie. Voilà un film abouti et parfaitement maîtrisé, reprenant le thème de Delivrance et la structure de Predator à son compte, dans des décors claustrophobiques réussis. Pratiquement tous les gimmicks propres aux films de genre sont savamment réutilisés au point que le métrage semble abondamment balisé, mais cela fonctionne parce que complètement assimilé et assumé.
L’histoire est centrée sur six jeunes femmes (dont deux sœurs) qui se retrouvent dans un coin des Appalaches dans le but de pratiquer un peu de spéléologie. La plupart d’entre elles, britanniques, avaient l’habitude de faire ensemble du sport extrême mais, un an auparavant, Sarah a perdu son mari et sa fille dans un accident dont elle a du mal à se remettre.
La première séquence, essentielle et diablement efficace, montre l’héroïne en train de faire du rafting avec deux de ses amies juste avant que le drame ne vienne la frapper de plein fouet. C’est donc un peu pour elle que Juno (June en VF) organise cette expédition, censée n’être qu’une partie de plaisir, de détente via quelques décharges d’adrénaline. Malheureusement, trop confiante en ses capacités d’athlète, elle entraînera ses compagnes d’infortune au fond d’un réseau de boyaux sans issue dans lesquels elles s’apercevront vite qu’elles ne sont pas seules…
Sans parvenir à vraiment terrifier, le film secoue et prend aux tripes ; Neil Marshall se débrouille pour ne pas lâcher pas le spectateur en évitant, contrairement aux nombreuses productions du même genre, des séquences doucereuses ou romantiques destinées à calmer le tempo, à faire respirer le script. Ici, c'est du survival pur et simple, il faut se bouger pour réussir : les masques tombent, les principes volent en éclats, car il faut s’en sortir, coûte que coûte. Les références au classique Délivrance sont patentes (voyez le nom du parc national où les filles se retrouvent : un gros lien de parenté avec celui de la rivière dans le film de John Boorman). Bien aidé par des actrices investies corps et âme (sans doute le rôle de leur vie), il distille un métrage puissant et haletant.
On peut en toute bonne foi reprocher à the Descent de ne pas être du tout original : entre des plans rappelant furieusement Carrie et une séquence entièrement calquée sur Predator, on peut tout à fait se demander où est la réussite annoncée. Mais c'est moins l’originalité et le montage des plans choc que la maturité de la mise en scène qui convainc : on est loin des films gore ultra-référentiels s'adressant aux ados, et pourtant les recettes sont les mêmes, impossible de le nier. C’est donc qu’avec les mêmes ingrédients, on arrive avec beaucoup d’aplomb, du style et du culot, à réaliser un film saisissant et âpre, adulte et sombre. C’est rassurant.
Une œuvre maligne donc, et efficace jusqu'au bout (avec sans doute le
meilleur choix de fin possible). A l’époque de Cloverfield et REC, Marshall (qui s’était déjà fait connaître par le surprenant Dog Soldiers et renouvellera son aura avec Troll Hunters)aurait pu proposer de la tourner en caméra subjective (le scénario s’y prêtait plutôt bien) mais le résultat est suffisamment pertinent pour qu’on se satisfasse de son choix.
Titre original | The Descent |
Date de sortie en salles | 12 octobre 2005 avec la Fabrique de Films |
Date de sortie en vidéo | 20 avril 2006 avec Paramount |
Photographie | Sam McCurdy |
Musique | David Julyan |
Support & durée | DVD Paramount (2006) zone 2 en 2.35:1 / 109 min |