Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
C’est le jeudi 14 juin que nous avons eu l’opportunité de rencontrer, en compagnie d’autres blogueurs, le génial réalisateur Brad Bird, accompagné de ses deux producteurs John Walker et Nicole Grindle. Venus à Paris pour parler des Indestructibles 2, c’était l’occasion d’en apprendre un peu plus sur le travail de l’un des metteurs en scène les plus talentueux d’Hollywood.
Brad Bird : Oui bien entendu, c’était un défi mais cela rend le film dynamique et sympathique d’alterner d’un style à un autre.
Nicole Grindle : Je pense que tu as fait un travail fantastique en utilisant les pouvoirs super héroïques pour parler de ce qu’il se passe dans cette famille, avec le père symbole de force, la mère qui s’étire dans toutes les directions, une adolescente qui n’est pas sûre d’elle et qui garde les autres à distance avec son pouvoir d’invisibilité et son bouclier, un petit garçon plein d’énergie et qui appuie sur tous les boutons qu’il trouve et un bébé qui symbolise un potentiel illimité. Jack Jack peut faire tout un tas de différentes choses et l’on ne connait pas les pouvoirs qu’il gardera lorsqu’il sera plus grand.
John Walker : Ce que l’on cherche le plus à faire c’est de revenir à une normalité dès que l’on passe trop de temps avec le côté super héros. Et inversement. C’est un équilibre que l’on cherchait vraiment à avoir, comme dans le premier film.
A une époque où nous sommes abreuvés de films de super héros, cela a-t-il influencé votre travail ?
Brad Bird : Je pense que cela a un peu cassé mon enthousiasme, parce que cela prend des années pour faire ces films. Il y a quelques années, j’ai pensé qu’il y avait trop de films de super-héros et que l’on allait sortir notre film alors que les gens seraient devenus blasés. Ça m’a contrarié pendant environ une heure, mais j’ai réalisé que ce qui m’intéressait surtout c’était d’utiliser le genre super héroïque pour faire un film sur la famille.
Pouvez-vous parler de votre mise en scène, qui évoque un cinéma d’auteur aux antipodes des blockbusters habituels ?
Brad Bird : (Riant) merci beaucoup pour ce compliment ! Pixar est une compagnie extraordinaire qui apprécie la différence des réalisateurs. Les films de Pete Docter sont différents des miens, ceux de Andrew Stanton également, ceux de John Lasseter, ceux de Lee Unkrich. C’est la force de ce studio, qui a différentes voix. Le court-métrage qui est joué avant notre film, Bao, est fait par une réalisatrice qui a une voix différente et merveilleuse. Je suis juste heureux que le studio apprécie ces différences entre les conteurs.
John Lasseter va bientôt quitter Pixar, comment avez-vous pris la nouvelle et quel rôle a-t-il eu dans Les Indestructibles ?
Brad Bird : Il était très impliqué dans le processus narratif du film, c’est un très bon conteur. On a profité de son talent. Disney ne voulait pas vraiment faire le premier film, et il s’est interposé entre notre film et les exécutifs, qui n’ont pas duré longtemps chez Disney pour être honnête. Il nous a permis de faire le film. Ce projet n’aurait pas été réalisé sans l’aide de John donc.
Nicole Grindle : J’ai beaucoup de reconnaissance envers John d’avoir créé le studio Pixar, qui a fait 20 films avec tous ces réalisateurs aussi différents que Pete Docter, Andrew Stanton… Et même la réalisatrice de Bao, Domee Shi, qui prépare son propre long-métrage. On est vraiment ravis qu’une femme puisse réaliser son film.
Dans le film, l’on remarque qu’Usher fait un caméo. Pouvez-vous nous en dire plus ?
John Walker : Il n’a pas arrêté de nous appeler, son agent n’a pas arrêté. C’est un très grand fan des Indestructibles. On n’avait pas vraiment de grand rôle à lui donner.
Brad Bird : Nous n’avions pas de rôle à la Usher !
John Walker : On lui a dit « On n’a que ça pour toi, mais si tu veux le faire… », et il a répondu « Oui ! Absolument ! Absolument ! » !
Nicole Grindle : Il nous a dit que c’était sur sa liste de rêves.
Brad Bird : Usher s’est senti totalement impliqué d’un point de vue créatif, il a eu son moment clé avec Frozone. Après le doublage, il a crié « Je suis dans Les Indestructibles » !
Dans Les Indestructibles 2, il y a des scènes avec des destructions urbaines. Ces images vous ont-elles donné l’idée d’adapter 1906 pour votre prochain film ?
Brad Bird : Oui, c’est une répétition si vous voulez ! Non, j’espère toujours faire ce film mais c’est un projet très complexe avec cette époque aux Etats-Unis, mais je n’ai pas envie de passer encore plusieurs années de ma vie sur ce film sans le faire, donc on verra bien !
Certaines idées qui n’avaient pu être intégrées dans le premier Indestructibles ont-elles servi dans ce film ?
Brad Bird : Oh oui ! Le combat entre le raton laveur et Jack Jack notamment. Un artiste merveilleux qui a travaillé sur le premier film, Teddy Newton, avait eu cette idée qui m’avait marqué. C’est pas le truc à faire dans un film, mais c’est pourquoi c’était aussi attractif ! A l’origine la scène avec la baby-sitter Carrie était une valve de sécurité dès que l’intrigue devenait trop confuse ou complexe et l’on pouvait toujours couper pour revenir sur elle. Mais en fait, il n’y avait jamais de bonne raison pour couper l’intrigue. La scène est devenue un court-métrage pour la sortie du Blu-ray/DVD. J’ai toujours su qu’il fallait que la famille ne sache pas ce que le public savait, c’est-à-dire que Jack Jack a de multiples pouvoirs. On savait qu’on pourrait l’utiliser dans un nouveau film.
Devra-t-on attendre 14 ans pour avoir un troisième film ?
Brad Bird : Il vous faudra attendre 17 ans ! A chaque fois que les gens aiment un film, il y a ce phénomène étrange, j’essaie de ne pas trop tenir compte des avis sur Internet, mais quelques fois je fais l’erreur de regarder et il y a toujours ce genre de remarque « J’ai aimé le premier film, t’as pas intérêt à me décevoir ! », ce qui n’est pas exactement ce qu’il faut pour rester créatif ! Bien sûr, lorsque quelque chose marche, la première réaction est de vouloir satisfaire les gens en pensant « Il faut que je mette ça dans la suite »… Mais si vous commencez à penser comme ça, ça devient une check-list. J’essaie juste de me demander ce que j’aimerais voir au cinéma et c’est comme ça que j’ai mes idées.
John Walker : On ne pense pas au troisième film. Il faut d’abord sortir celui-ci.
Brad Bird : Oui ! Allez dans une maternité et demandez aux femmes qui viennent juste d’accoucher après 16 heures de travail « Allez ! Le prochain c’est pour quand ? » !
Pouvez-vous dire quelques mots sur le look 70’s du film ?
Brad Bird : 60’s ! Les sixties étaient cool, pas les seventies ! Ça vient de ce que je regardais lorsque j’étais jeune, les premiers super-héros que je voyais n’étaient pas très bons au cinéma ou en série quand j’étais petit. En fait, les méchants avec leurs plans over the top et leurs gadgets viennent des films d’espionnage. Ce sont devenu mes super-héros, les films avec des méchants au nom comme Docteur No, Goldfinger, comme dans les comic-books. Les Batman et Superman n’étaient pas vraiment qualitatifs.
Nicole Grindle : Il y avait Johnny Quest de sympa !
Brad Bird : Johnny Quest oui ! Ça c’est ce que dont tout jeune garçon a besoin !
Samuel L Jackson joue Frozone mais aussi Nick Fury, pourrait-on vous voir un jour sur un film Marvel ?
Brad Bird : On m’en a proposé quelques-uns, la plupart sont devenus de gros succès sans moi donc c’est peut-être bien que je ne les ai pas faits (rires) ! J’ai déjà mes films de super-héros, ce sont ces films ! Ça me suffit très bien !
Le discours de l’hypnotiseur est assez politique, sur l’addiction aux écrans, mais c’est le méchant du film. Vous adhérez à ces idées ?
Brad Bird : C’est vrai que vous pouvez vous dire « C’est un film, vous regardez vous aussi un écran ! », c’est méta. Les méchants sont les meilleurs quand ils ont un point de vue, un discours qui se tient.
Nicole Grindle : Ils sont plus intéressants. On a déjà vu des tas de fois des méchants qui veulent conquérir le monde.
Et entre le méchant du premier film et celui-ci, lequel préférez-vous ?
Brad Bird : Je ne veux pas spoiler mais je pense que peut-être celui du premier film.
Avec le premier Indestructibles, vous avez eu énormément de défis techniques à relever. En 2018, qu’en est-il sur cette suite ?
Brad Bird : Oui bien entendu, il y a de nouveaux défis. Lorsque nous faisions le premier film, on était à la limite parce que personne ne savait le faire bien, et Pixar non plus. Aujourd’hui, nos équipements sont meilleurs, l’équipe plus expérimentée, il y a des nouveaux talents qui viennent du monde entier, mais le vrai défi, peu importe le budget du film, c’est de trouver une bonne histoire, de bons personnages. C’est le plus important.
Titre original | The Incredibles 2 |
Date de sortie en salles | 4 juillet 2018 avec Walt Disney |
Date de sortie en vidéo |
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Animation | Tony Fucile |
Musique | Michael Giacchino |
Support & durée | 35 mm en 2.35 :1 / 118 min |
[critique] les Indestructibles 2 - l'Ecran Miroir
Excellente suite du Pixar sorti en 2004 , Les Indestructibles 2 s'inscrit parfaitement dans la continuité thématique des films de Brad Bird avec cette volonté d'affirmer que " tout le monde peut...
http://www.ecran-miroir.fr/2018/07/critique-les-indestructibles-2.html