Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
On pourrait s’y tromper, en fait.
Ansel Elgort jouant un ado au sourire désarmant et à la mèche rebelle, écoutant de la vieille (mais bonne !) musique sur des cassettes et torturé par la perte de sa maman… Pour un peu, on se croirait dans Baby Driver !
Le fait est que ceux qui ont vu le très bon film d’Edgar Wright auront une furieuse impression de déjà vu avec les premières séquences. Une impression qui se désagrège très vite : le tempo, la mise en scène, le cadrage, la bande-son sont loin d’être similaires.
November Criminals est l’adaptation douce-amère d’un roman qui a fait son effet, tout entière focalisée sur son couple vedette qui occupe l’essentiel de l’espace filmique : Addison et Phoebe, deux amis d’enfance que les aléas de la vie ont un peu séparés, décident de franchir le pas et d’aller plus loin dans leur relation équivoque alors qu’ils finissent leur cycle secondaire et postulent l’un pour l’université de Chicago, l’autre pour Yale. Phoebe aurait pu se contenter de thésauriser sur sa popularité (elle est mignonne et riche) mais personne ne comprend ce qu’elle trouve à ce bôgosse mal dans sa peau depuis la mort de sa mère et qui s’enferme dans un monde à part rythmé par les refrains de Bowie. A l’heure des smartphones et des iPods, il écoute des cassettes dans une vieille BMW et se fait contacter sur son pager. Parmi ses seuls amis, il y a Kevin, le mec sympa qui bosse au café du coin et qui s’inquiète pour lui. Kevin qui, quelques minutes après qu'Addison et Phoebe l'ont quitté (ils allaient coucher ensemble pour la première fois), se fait abattre froidement sur son lieu de travail. La police évoque timidement un règlement de comptes entre gangs, mais Addison n’accepte pas : Kevin, c’était un pote en or, un gars réglo, impossible qu’il ait été mêlé de près ou de loin à la drogue. Du coup, malgré l’avis contraire du proviseur, il décide de mener lui-même l’enquête, plus ou moins épaulé par une Phoebe qui craint pour la santé mentale de son fragile petit ami…
Cela aurait pu aller à cent à l’heure, mais Sacha Gervasi (scénariste du Terminal et déjà réalisateur d’Hitchcock) préfère prendre son temps, suivant les palabres enthousiastes d’Addison incarné par un Elgort encore en devenir mais déjà terriblement séduisant dans ses hésitations. Son personnage est en revanche nettement plus agaçant dans ses atermoiements et son côté « Jean de la Lune », d’une candeur frustrante face à la cruauté d’une société à laquelle il n’adhère pas. Cela donne au film une forme de Candide chez les gangsters et on ne sait plus si on doit sourire ou pleurer devant son attitude désarmante face aux policiers, aux parents dévastés du défunt ou aux dealers. Il y a quelque chose de singulièrement malsain dans sa persévérance et sa pusillanimité donnant au tout un caractère un peu surréaliste. Chloe Grace Moretz, alias Phoebe, alterne le bon (face aux adultes, et notamment la délicate Catherine Keener qui joue sa mère) et l’habituellement fade (ses scènes de couple ne passent pas, elle y apparaît emprunté ou guindée), mais la caméra parvient à la magnifier pour lui donner l’apparence d’une de ces baby-dolls reines de promo. Les seconds rôles étant réduits à la portion congrue (dommage pour le discret David Strathairn, pourtant plus que convaincant), on se contente de suivre bon an mal an les tribulations d’Addison au pays de la came jusqu’à un finale déconcertant.
Même si cette production ressemble davantage à un ersatz de Baby
Driver tout à la gloire de David Bowie, elle permet de mieux se rendre compte du potentiel du jeune Elgort qu’on attend déjà dans Billionaire Boys Club entre Taron Egerton et Kevin Spacey. Sony Pictures le proposera en vidéo à partir du 17 janvier ; le DVD et le Blu-ray seront accompagnés d’une copie digitale Ultraviolet et d’un making-of pour seul bonus.
Titre original | November Criminals |
Date de sortie en salles |
|
Date de sortie en vidéo | 17 janvier 2018 avec Sony Pictures |
Photographie | Mihai Malaimare Jr |
Musique | David Norland |
Support & durée | Blu-ray Sony (2017) region B en 1.78:1 / 85 min |