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Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.

[critique] Marvin, ou la Belle Education

[critique] Marvin, ou la Belle Education

Lauréat du Queer Lion au festival de Venise, Marvin est un film sur la révélation à lui-même d’un acteur homosexuel par l’intermédiaire de sa transformation de Marvin Bijoux en Martin Clément. Le film adopte un point de vue fort porté par la réalisation fine et sensitive d’Anne Fontaine.

 

Un film comme Marvin est assez difficile à appréhender. La nature fractionnée du film traite avec ses allers et retours dans le temps de plusieurs thématiques tout au long du métrage.

[critique] Marvin, ou la Belle Education

Le film commence en effet par une sorte de constat sinistre d’une vie pauvre dans les Vosges qui contraint et inhibe le personnage principal. Il est victime de violences aussi bien physiques que mentales. Ces passages, que ce soit à l’école ou chez lui, sont assez crus et cherchent à nous mettre mal à l’aise - mission accomplie avec brio. Cela place Marvin sur une trajectoire sordide où, pour se conformer à son milieu social, il cache et enfouit son homosexualité au fond de lui comme une tare. Tout l’exercice du film sera de voir comment quelques rencontres clés lui permettront de devenir cet acteur revanchard que l’on entraperçoit dès le début du film.

 

Le métrage est d’ailleurs essentiellement basé sur un jeu de regards. Anne Fontaine cherche à nous mettre à la place du personnage principal et nous faire épouser son point de vue sur le monde. Elle opère cela non pas en nous montrant ce qu’il voit mais en nous le montrant regarder le monde qui l’entoure. L’empathie du spectateur est mise à contribution et ce procédé est très efficace, pour peu que l’on se laisse porter par celui-ci. Le film n’en est pas contemplatif pour autant. Le spectateur est constamment mis à contribution, cherchant les correspondances dans l’enchevêtrement de ses temporalités.

[critique] Marvin, ou la Belle Education

L’écriture de Marvin est très bien réfléchie. Ayant pour base le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule d’Edouard Louis, Anne Fontaine et Pierre Trividic ont pris l’option de ne pas l’adapter littéralement. Ils s’en sont servi comme d’un point de départ pour une trame plus ample qui terminait la boucle d’évolution du personnage. Le roman d’origine s’arrêtait au moment où le personnage principal quittait son environnement pour embrasser sa carrière d’acteur en partant suivre ses études dans une autre ville. Là où un autre film se serait arrêté avec la transformation finale de Marvin et la confrontation scénique de son passé, les deux scénaristes ont choisi l’option, payante, de pousser encore un peu plus loin leur script. Les dernières scènes forment une confrontation inattendue mais salutaire dans la mesure où elles changent la perception globale du film. L’objectif n’est plus de voir comment un personnage s’est réinventé mais aussi de constater comment ce parcours révèle un amour enfoui sous la rudesse des relations familiales. On finit donc sur une note positive et poétique qui s’avère satisfaisante.

[critique] Marvin, ou la Belle Education

Il est certain que le finale élève le film mais de nombreuses subtiles touches de bienveillance traversent le récit. La plupart des personnages sont bourrus et directs simplement parce qu’ils ne savent pas exprimer leurs sentiments aux personnes qui les entourent autrement. Le personnage de Dany Bijoux, interprété superbement par Gregory Gadebois est le plus bel exemple de ce souci apporté aux seconds rôles autant qu’au personnage principal. Son évolution tout au long du récit est touchante et bien plus sensible que la vision un peu simpliste que l’on en a au début.

Le film est d’ailleurs porté par un casting absolument remarquable dont

la révélation est assurément Jules Porier qui joue le rôle complexe de Marvin enfant avec une grâce et un naturel désarmant à un si jeune âge.

 

Au final, Marvin est un beau film qui mérite que le spectateur s’y investisse. Bon nombre d’images marquantes reviennent en tête bien après la sortie de la salle - et ça, c’est toujours un bon signe.

Titre original

Marvin ou la Belle Education

Date de sortie en salles

22 novembre 2017 avec Mars Films

Date de sortie en vidéo

 

Photographie

Yves Angelo

Musique

Hubert Cornet

Support & durée

35 mm / 113 min

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