Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
Parce qu'il s'agit de la première œuvre de la petite-fille de Francis Ford Coppola et nièce de Sofia, parce qu'il s'agit de la retranscription cinématographique d'un roman de James Franco et parce qu'elle fait appel à toute une jeune génération de comédiens encore peu expérimentés, Palo Alto intrigue autant qu'il frustre et qu'il suscite de l'engouement. Ses plus grandes réussites sont également ses plus grands défauts, et ses hésitations et maladresses lui donnent au contraire une délicatesse bienvenue.
Pour ses débuts dans la mise en scène, Gia Coppola choisi de s'atteler à l'une des histoires tirée du roman de son ami James Franco, ce dernier lui ayant donné son accord avec enthousiasme (il interprète en outre un personnage). Il faut dire que si c'est la première fois que la petite fille de Francis Ford Coppola aborde la réalisation, elle est néanmoins une habituée des plateaux de tournage, notamment de ceux de sa tante, Sofia, où elle a pu occuper différents postes d'assistante ou de consultante par exemple. Il est donc assez logique de la voir désormais à la direction d'un long-métrage, le talent étant de toute évidence héréditaire dans sa famille. Et cela ne rate pas : son Palo Alto est un petit exploit.
Il convient toutefois de tempérer son enthousiasme car ce film n'est pas dénué de défauts, à commencer par la fâcheuse tendance qu'a Gia de vouloir copier le style de sa tante. Sur sa forme, Palo Alto est une réussite. Sa photographie est superbe, sa bande originale est idéale, bref, c'est un régal. Mais toute l'esthétique lorgne tellement vers l'œuvre de Sofia Coppola, que cela en devient par instants un peu frustrant : on aurait aimé voir un film de Gia et non une sorte de best of du cinéma de la réalisatrice de Lost In Translation. Il y a pire comme référence, mais dans le cas de Palo Alto, on peut se demander à quel point cette énorme influence ne traduit pas le manque d'expérience de Gia, préférant jouer la sécurité avec une sorte d'imagerie un peu complaisante, plutôt que de faire preuve d'indépendance. Gia Coppola semble en être consciente, comme l'atteste le poster de Virgin Suicides affiché dans la chambre d'Emma Roberts, privilégiant sans aucun doute l'écriture d'une histoire solide (elle est également scénariste) au détriment de la création de son propre univers.
On est en terrain connu, la forme est donc très réussie, à défaut d'être originale et inventive. C'est pourtant l'aspect le mieux maîtrisé du film, même s'il est paradoxalement le plus critiquable. En revanche, tout ce qui a trait au fond, nettement plus hésitant et maladroit, s'avère aussi le plus intrigant. La réalisatrice opte pour un récit décousu, une chronique sur l'adolescence, parfois approximatif dans sa construction scénaristique mais débordant de sincérité et de justesse. Dans le genre on lui préfère le très bon Le Monde De Charlie, mais Palo Alto est également très recommandable. La réalisatrice apporte une touche de délicatesse à ce film simple qui laisse s'exprimer des acteurs débutants mais déjà prometteurs (on pense notamment au fils de Val Kilmer, dont c'est la première apparition sur grand écran).
Ne cherchant pas à révolutionner son monde, Gia Coppola se montre réservée, prudente, pertinente tout en faisant preuve d'un talent que l'on imagine bien plus grand et qui se révèlera dans son prochain film.
Titre original |
Palo Alto |
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Mise en scène |
Gia Coppola |
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Date de sortie |
11 juin 2014 avec Pathé |
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Scénario |
Gia Coppola, d'après James Franco |
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Distribution |
James Franco, Emma Roberts, Jack Kilmer & Val Kilmer |
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Photographie |
Autumn Durald |
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Musique |
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Support & durée |
1.85 : 1 / 100 minutes |
Synopsis : Piégés dans le confort de leur banlieue chic, Teddy, April, Fred et Emily, adolescents livrés à eux-mêmes, cherchent leur place dans le monde. Ils ont soif de sensations fortes et testent leurs limites. L’alcool, les drogues et le sexe trompent leur ennui. Ils errent sans but dans les rues ombragées de Palo Alto incapables de voir clair dans le tourbillon confus de leurs émotions. Sauront-ils éviter les dangers du monde réel ?