Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
Synopsis : En 208 après J.-C., l'empereur Han Xiandi règne sur la Chine pourtant divisée en trois royaumes rivaux. L'ambitieux Premier ministre Cao Cao rêve de s'installer sur le trône d'un empire unifié, et se sert de Han Xiandi pour mener une guerre sans merci contre Shu, le royaume du sud-ouest dirigé par l'oncle de l'empereur, Liu Bei. Liu Bei dépêche Zhuge Liang, son conseiller militaire, comme émissaire au royaume de Wu pour tenter de convaincre le roi Sun Quan d'unir ses forces aux siennes. A Wu, Zhuge Liang rencontre le vice-roi Zhou Yu. Très vite, les deux hommes deviennent amis et concluent un pacte d'alliance.
Furieux d'apprendre que les deux royaumes se sont alliés, Cao Cao envoie une force de 800 000 soldats et 2000 bateaux pour les écraser. L'armée campe dans la Forêt du Corbeau, de l'autre côté du fleuve Yangtze qui borde la Falaise Rouge où sont installés les alliés. Face à l'écrasante supériorité logistique de Cao Cao, le combat semble joué d'avance, mais Zhou Yu et Zhuge Liang ne sont pas décidés à se laisser faire...
Dans un déluge de puissance et de génie tactique, la bataille de la Falaise Rouge va rester comme la plus célèbre de l'Histoire et changer le destin de la Chine pour toujours.
Passionnant.
Les Trois Royaumes est un film vraiment immanquable.
Précision cependant : la version "longue", ou plutôt version asiatique ou version "normale" en deux parties est immanquable. La version cinéma occidentale est une erreur. Comment condenser deux films de 2h20 (soit quasiment 5h au total) en un film de 2h30 sans sacrifier une partie de l'histoire et la caractérisation des principaux personnages ?
J'avais boycotté la version cinéma lorsque j'avais appris que le film était en fait une "saga" en deux parties. Heureusement l'annonce de la sortie en vidéo du vrai montage n'a pas tardé (juste après la sortie en vidéo du montage occidental).
Sorti le 13 avril en blu-ray et DVD en version "longue" en deux parties, il s'agit d'un achat plus que très recommandable.
Bref, cette version longue est vraiment la version à voir. Et tant qu'à faire, essayez de voir les deux parties à la suite, sans coupe.
Les Trois Royaumes est à la base un livre ultra complexe mêlant faits historiques et dimension mythique. L'un des livres les plus populaire en Chine. Écrit par Luo Guanzhong au 14e siècle, d'après l'œuvre de Chen Shou datant du 3e siècle, le livre est le premier roman divisé en chapitres apparu en Chine.
Vous imaginez aisément qu'il fallait un grand metteur en scène à la barre pour oser se frotter à un tel monument de la littérature.
Bien sûr, le film ne retrace qu'une partie de ce livre.
Et donc, après une longue période à réaliser des films aux États-Unis, revoilà John Woo de retour chez lui et prêt à renouer avec le Wu Xia Pan.
Et avec quelle maîtrise !
Disons-le de suite, je n'avais pas pris une aussi grosse claque depuis longtemps. J'adore les films asiatiques. Eh bien celui-ci est une perle, un chef d'œuvre, une aventure inoubliable.
En fait, je retrouve quasiment les mêmes sensations que devant le Seigneur des anneaux ou Avatar. Probablement les plus grands spectacles vus au cinéma depuis 2001 donc.
Les Trois Royaumes m'a donc enchanté. C'est un spectacle visuellement éblouissant et thématiquement extrêmement passionnant et puissant.
Honneur, respect, amitié. Des grands thèmes représentatifs de la filmographie de John Woo et qui trouvent ici une résonance forte. Le mélange Histoire/Mythe est convaincant. Jamais le film ne parait trop lourd. Il trouve un équilibre.
Le côté historique n'est pas rébarbatif comme on pourrait le penser (et comme les producteurs ont eu l'air de le penser également pour justifier la version courte cinéma), il est au contraire captivant. La dimension mythique est quant à elle la bienvenue et ajoute un peu de mystère et de charme.
C'est du grand cinéma. De grands sentiments, des actions incroyables, du dépassement de soi. Les petites histoires se mêlent à la grande en un ensemble plutôt cohérent. Les personnages principaux représentent des archétypes, des idéaux, tous forcément essentiels au scénario. Quand on voit la version cinéma qui va jusqu'à en couper certains, c'est assez frustrant, non ?
Tony Leung (l'un de mes acteurs favoris) est bouleversant de charisme. Takeshi Kaneshiro est merveilleux. Quel bonheur de les retrouver ensemble à l'écran (rappelez-vous de Chungking Express de Wong Kar Waï) !
Pareil pour certaines scènes absentes de la version courte mais qui paraissent pourtant tellement importantes dans la version longue.
J'ai particulièrement adoré la simplicité de la réalisation. Le récit est rendu fluide et limpide grâce à un montage extrêmement réfléchi.
Le film se concentre sur les aspects stratégique des batailles. Le montage nous présente la plupart du temps l'idée du stratège suivie de l'exécution du plan et la réaction de l'ennemi. Très simple.
Cet aspect stratégique est l'un des points les plus appréciable. On jubile de voir les clans s'affronter par des plans extrêmement minutieux et étonnants. Les idées hallucinantes se succèdent et laissent le spectateur avec une espèce de sourire en coin devant tant d'intelligence et de maîtrise.
La récolte de flèches est non seulement originale mais aussi vraiment drôle.
Les batailles sont immenses. Probablement les plus grandes vues depuis le Seigneur des anneaux. Avec des plans larges saisissants, Woo nous montre des armées gigantesques. Chaque scène d'action se différencie des autres par des choix de mise en scène logiques. Jamais ennuyantes.
Mais les scènes de combats (superbement réalisées) ne sont pas la seule force du film en réalité. L'idée de faire communier l'Homme avec la Nature est ici magnifiquement représentée. Le stratège regardant les nuages pour prédire l'avenir par exemple.
Mieux encore, l'inspiration de la Nature comme élément déterminant : de tous temps, l'Homme s'est inspiré du règne animal pour inventer et façonner sa propre vie au travers de nouveaux "objets". L'observation du Monde comme l'élément essentiel à la victoire en fait. La scène de la tortue est magnifique. N'oublions pas les autres animaux comme éléments narratifs essentiels : l'oie, le bœuf, la colombe et le cheval.
J'ai adoré cette approche assez originale.
La musique joue également un rôle crucial. La séquence de duel musical entre Leung et Kaneshiro est l'une des plus belles du film. Leung qui a d'ailleurs une oreille tellement fine qu'elle en devient légendaire. Son introduction dans le film est remarquable.
Quant à la musique du film en général, elle est suffisamment réussie pour rester ancrée en mémoire et suffisamment subtile pour souligner l'action sans l'alourdir.
L'un des plus beaux spectacles que j'ai vus depuis longtemps - et je pèse vraiment mes mots.
Ne surtout pas visionner le film dans sa version raccourcie.
Regardez les deux films d'affilée.
Pour l'histoire, je me suis instantanément mis à la lecture de l'Art de la guerre de Sun Tzu, livre souvent cité en référence dans le film par les personnages. Passionnant !
Dans sa version longue (en fait deux films de plus de deux heures qui se suivent), l’épopée furieusement épique qui apparaissait au cinéma se transmue en chanson de geste, ralentissant le tempo et se dotant de respirations nostalgiques ou de parenthèses poétiques voire musicales qui mettent parfois à mal la patience du spectateur mais font la part belle à des personnages auparavant sous-traités (notamment les deux femmes, qui d’auxiliaires du récit en deviennent le pivot). Ces longs focus sur quelques-uns des protagonistes font de cette guerre titanesque une affaire d’individus, un peu comme des chants homériques dont on aurait ôté la partie divine.
Ralentis à foison, vol de palombes et plans saisissants viennent compléter ce spectacle gigantesque éclaboussé par la classe de Tony Leung.
Dans la seconde partie, la tension constante de la grande bataille annoncée dynamise davantage le métrage qui aligne alors les morceaux de bravoure et confie aux deux seuls rôles féminins les clefs de la résolution du conflit, réduisant proportionnellement les actions d’éclat des grands héros de guerre et mettant sous la même chape obscure tous les protagonistes de cette opposition fratricide.
Woo use de toute sa grammaire cinématographique pour illustrer une œuvre généreuse et flamboyante qui s’achève, comme il se doit, dans la grâce et la gravité (« Personne par la guerre ne devient grand », dirait un autre chef de guerre à la sagesse tutélaire).
Titre original |
Chi Bi |
Date de sortie en salles |
25 mars 2009 avec FilmExport |
Date de sortie en vidéo |
13 avril 2010 avec Metropolitan Video |
Réalisation |
John Woo |
Distribution |
Tony Leung Chiu Wai, Takeshi Kaneshiro, Zhang Fengyi, Andy Lau & Sammo Hung |
Scénario |
John Woo, Khan Chan, Sheng Heyu & Kuo Chang d’après Luo Ghanzhong |
Photographie |
Yue Lu & Zhang Li |
Musique |
Tarô Iwashiro |
Support & durée |
Blu-ray Metropolitan édition ultime (2013) en 2.35:1 / 285 min |
Test blu-ray
Packaging :
Une boîte en carton solide type le Seigneur des anneaux regroupant deux livres illustrés accompagnés des disques. Magnifique.
Menu :
Fades, peu importe. La musique peut vite vous saouler si vous laissez tourner le menu en boucle néanmoins.
Image :
Un sans faute. Du grain cinéma bel et bien présent, une définition remarquable faisant apparaître quelques images de synthèses. La colorimétrie est parfaite. Un bémol si on veut vraiment chipoter, comme je le fais, avec un plan possédant une bande verticale en plein milieu sur le premier film. Mais le spectacle est total.
Son :
Un son assurant une excellente projection, mais pas si naturel que ça. Le mixage m'a paru artificiel. Attention cependant, c'est un excellent mixage, avec effets directionnels variés, basses gigantesques et clarté.
Mais quand on a goûté au Seigneur des anneaux...