Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
Evil Dead II : Dead by Dawn ·····
Ecrit par Sam Raimi et Scott Spiegel
Avec la participation de Bruce Campbell et Robert Tapert
Réalisé par Sam Raimi (1987)
Musique de Joseph Lo Duca
Studio Canal – Zone 2
Suite des malheurs d’Ash, seul dans la profondeur des bois sombres, alors que les esprits assaillent le chalet et cherchent à le rendre fou… Enfin… seul… pas tout à fait !
Lorsque Sam Raimi conçoit Evil dead 2, il établit le même rapport que George Miller pour son The road warrior face à Mad Max : la récréation d’un mythe à partir d’un même univers, par l’intermédiaire d’un film qui se pose à la fois comme suite directe et remake, pour en transcender les intentions et appréhensions.
Avec Evil dead 2, Sam Raimi corrige en quelque sorte son premier volume. De fait, dès l’introduction, le réalisateur résume des événements qui ne nous ont pas été présentés comme tels dans le film original. Plus esthétiques, plus propres, plus ambitieuses—et aussi plus caustiques via un second degré ahurissant de niaiserie assumée (voir Ash au piano et avec sa bouteille de vin) —, ces images n’hésitent pas à supprimer plus de la moitié des personnages d’Evil dead pour se concentrer sur la virée en forêt d’un couple romantique. L’ambiance sirupeuse basculant assez vite, lecture du magnétophone à l’appui, à l’apparition de l’esprit de Kandar et aux possessions et autres démembrements que l’on nous a déjà racontés mais, donc, cette fois, sous un autre angle, un nouveau point de vue cinématographique bien différent.
C’est tout d’abord là qu’est le génie du film, car ce double rapport de suite/remake sera insidieusement présent dans l’œuvre entière. Stimulé par un budget plus important et par l’aura unique de cette collaboration à trois (ou plutôt à quatre, l’apport de Scott Spiegel à la plume aux côtés du trio formé Sam Raimi, Robert Tapert et Bruce Campbell étant loin d’être négligeable), Raimi décide rapidement d’auto-parodier son propre Evil dead et se sert d’un scénario prétexte aux débordements outranciers pour souligner la futilité essentielle de son canevas narratif. Evil dead 2 a alors toute opportunité pour se réaliser comme le véritable cartoon gore tant espéré.
Film de génie, rythmé par un Chuck Jones sous acide et passé au shaker avec comme ingrédients Hanna Barbera, Tex Avery et les Trois Stooges, Evil dead 2 accumule les sketches où l’horreur la plus excessive le dispute à un humour irrésistiblement noir. Couleur mercure, baignant dans une encre à la densité insondable, le film transforme Ash en super héros armé d’un fusil à double canon scié et d’une tronçonneuse très groovy. Le personnage, porté par un Bruce Campbell qui achève son statut de Dieu vivant de l’humour vache, est le fruit de toutes les tortures d’un Sam Raimi particulièrement sadique : attaché à une moto lancée à toute allure dans les branches, tournoyant sur une roue, roué de coups par sa main possédée, noyé par des murs qui vomissent des flots de sang, Bruce Campbell devient un punching-ball vivant.
A la frontière entre l’horreur et le cartoon, Evil dead 2 s’impose sans aucune hésitation comme un chef-d’œuvre total. Doté d’une idée par plan, très révérencieux et affectueux envers Ray Harryhausen le temps de plusieurs séquences animées en stop motion (la danse du cadavre) ou de peintures sur caches et miniatures, c’est l’un des films les plus efficaces jamais réalisés : on ne s’ennuie jamais, on se fend la poire sur tout le métrage et on jubile devant tant de génie. Depuis la main maudite qui pousse des petits cris jusqu’à ce corps décapité armé d’un tronçonneuse, en passant par les objets du chalet pris en pleine crise de fou rire ou encore le reflet du miroir qui prend vie, Evil dead 2 est une folie furieuse de tous les instants.
Un film complètement culte qui culmine dans ces dernières minutes sur un final et un épilogue au grand guignol complètement dantesque !
Formidable restauration de l’éditeur. Piqué magnifique, noirs profonds, bleus transcendés, les ambiances d’encre d’Evil dead 2 sont admirablement servies, et le grain particulier de l’œuvre ainsi que sa texture plastique d’origine sont respectés.
Le cinéphile intègre pourra se tourner vers les pistes son d’origine, en VO comme en VF (doublage limite culte pour son interprétation mais la traduction fait perdre beaucoup de saveur à certaines répliques), cohérentes et intelligibles. Le nouveau mixage 5.1, inutile en VF, se veut plus probant en VO où la bande sonore gagne une belle dynamique d’ensemble, armée de quelques basses et d’effets arrière sporadiques. L’effort est néanmoins particulièrement porté sur la stéréo avant.
Studio Canal nous fait l’honneur de livrer, en exclusivité à la Zone 2 française, l’édition la plus complète du film sur le marché DVD.
On commence avec un boîtier digipack très élégant, dans les tons de l’œuvre, au toucher intriguant, pour finir avec un livret complet et cinéphile sur toute la production d’Evil dead 2.
On notera également que la structuration des menus des 2 DVD est particulièrement réussie.
Commentaire audio de Sam Raimi, Scott Spiegel, Bruce Campbell et Greg Nicotero : comme pour le premier film, voilà l’un des meilleurs commentaires audio jamais parus sur DVD, très drôle, furieusement porté avec un enthousiasme contagieux par Campbell, intarissable en informations sur et autour de l’œuvre entre deux blagues bien senties.
Making-of d’époque d’Evil dead 2 (30’) et interview portrait d’époque de Sam Raimi et son équipe (30’). Il y avait de quoi avoir peur devant ces modules promotionnels réalisés en 1987, mais il faut avouer qu’ils sont particulièrement savoureux, exhaustifs et bien fichus. Le ton décalé est donné dès les premières images et Sam Raimi s’y montre éminemment drôle et accessible.
Interview exclusive de Bruce Campbell (30’), réalisée en France et en festival. L’acteur revient sur la trilogie Evil dead ainsi que sur toute sa carrière avec une passion, un aplomb et une désinvolture très caustiques.
Portraits écrits, filmographies et biographies, bande annonce.