Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
Avec le recul, le plaisir de la re-découverte, et celui de le voir en VO, cet opus m'apparaît désormais moins long et (parfois) laborieux que par le passé – il faut dire que je l’avais vu 11 fois au cinéma et plusieurs fois à la TV, puis en Laserdisc et, à force, ça lasse. Cela dit, avec le support DVD, certaines scènes dont je me régalais avaient perdu beaucoup de leur attrait (la poursuite dans la forêt n’a plus autant d’impact qu'auparavant, malgré un montage réussi - mais les incrustations datent pas mal). En revanche, le combat spatial qui ressemblait naguère à un fouillis de vaisseaux trop rapide pour être intelligible est désormais nettement plus lisible en HD, les passes d’armes et rafales de lasers permettant de goûter avec une joie puérile au grand frisson.
Rien à rajouter sur les Ewoks, ce petit grain de sable dans les plans machiavéliques de l'Empereur qui fait le bonheur des (grands) enfants. Quant à la confrontation Luke/Vader, elle est plus intense, avec des dialogues plus expressifs que dans le souvenir laissé par la VF : connaissant cette dernière par cœur, je me suis laissé porter par la voix chaude d'Anakin et celle, plus mûre ici, de Luke. Il y a, dans certaines inflexions lorsqu'il s'adresse à son père mourant, des harmoniques touchants qui dégagent beaucoup plus d'émotion que dans le doublage, pourtant effectué avec soin.
Dans le même ordre d'idées, Yoda fait vraiment ses 900 ans de vie... La marionnette est avachie et la voix originale souffreteuse, moins guillerette que la française. Difficile de dire si on y perd ou pas.
En revanche, la nouvelle musique de fin recomposée pour l'Edition Spéciale est peu aisée à digérer : je préférais de loin la première qui était plus enjouée, moins mélancolique, et comportait des chœurs d'Ewoks davantage en phase avec les images. L'enchaînement avec le générique était également plus réussi, avec des accents lyriques soulignant la fin de la trilogie et nous faisant regretter d'y être déjà. Mais ce n'est qu'un détail, qui finit doucement par ne plus se faire sentir - comme la couleur de Jabba, pas assez verte et glauque en DVD mais nettement rehaussée sur le Blu-ray : elle colle mieux à la « grosse limace baveuse » qu’évoque Han Solo.
Et pour en venir à l'apparition d'Anakin jeune, si elle peut s'expliquer avec la nouvelle trilogie, il faut aussi le temps de l'assimiler : ça fait un choc, pour un vieux routier du triptyque « classique ». Et bien moins anodin qu'il n'y paraît...
Le Retour du Jedi est donc une œuvre un peu en demi-teinte, composée de trop-pleins jouissifs (les affrontements entre les rebelles et les forces impériales, dont on se surprend même à en trouver certains trop longs) et de déliés languissants (les dialogues lourds, pompeux entre Leia et Luke, qui plombent le rythme et nous sortent du récit). Cela dénote une forme de maladresse pataude avec le matériau pourtant si riche de la saga. On hésite constamment entre la noirceur de certains sujets et une légèreté acidulée (toute la séquence avec les Ewoks). Le côté dramatique du second volet se colore de mélo et cela crée une dysharmonie tendancieuse, entre le rythme effréné de A new hope et la maîtrise orchestrale de l’Empire contre-attaque : les violons tant décriés de l’Episode II ne sont pas loin. Cependant, comment ne pas ressentir la tension énorme dégagée par ce montage en parallèle des trois conflits (Luke/Palpatine ; Rebelles/Forces impériales sur Endor ; Armada rebelle/Etoile de la Mort en orbite) où, chaque fois, le duel change de tournure en raison d’un élément imprévu ? C’est Vader qui se souvient qu’il était père, et ces satanés Ewoks qui déjouent le stratagème impérial.
Ainsi s’achevait une saga homérique qui avait marqué de nombreuses générations. Avant qu’une prélogie voie le jour, et qu’une suite ne naisse des cerveaux enfiévrés de fans frustrés.
Titre original | Star Wars : Episode VI, Return of the Jedi |
Date de sortie en salles | 19 octobre 1983 avec 20th Century Fox |
Date de sortie en vidéo | 13 septembre 2006 avec 20th Century Fox |
Photographie | Alan Hume & Alec Mills |
Musique | John Williams |
Support & durée | Blu-ray Fox (2011) region B en 2.39:1 / 133 min |