Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
Peppermint fait partie de ces produits qui ne vous mentent pas, ne vous promettent pas monts et merveilles avant de vous décevoir invariablement, de ces films francs du collier tapant fort, durant peu et vous en offrant pour votre argent – si tant est que vous ayez payé votre place en salles ou votre galette en DVD ou blu-ray, ou encore la VOD sur l’une de vos plateformes du moment. Derrière cette affiche aussi belle qu’énigmatiquement épurée se cache un métrage misant sur l’efficacité : celle d’un script débarrassé de fioritures (au point de délaisser la traditionnelle séquence d’initiation/apprentissage de ces héros qui se découvrent et deviennent à la dure ce qu’ils ont choisi d’être), axé sur des valeurs solides (les motivations d’une femme qui a tout perdu et ne trouve nulle part la moindre once de compassion ou de Justice) et mis à l’écran avec énergie et savoir-faire et cette consciencieuse volonté d’orchestrer sur un tempo élevé le chant de mort d’une pasionaria.
Pourtant, rien ou presque ne prédisposait Riley à une telle destinée christique, à moins que le fait d’être une mère aimante et une femme dévouée ne soient déjà les pieds à l’étrier de l’héroïsme, pur et désespéré, celui d’une femme qui voit sa fille chérie abattue avec son père le jour de son anniversaire ; alors qu’elle se remet encore difficilement d’une balle à la tête à l’hôpital, elle apprend par la police qu’il s’agissait d’un règlement de compte organisé par un caïd local qui voulait « faire un exemple ». Las, alors même qu’elle identifie formellement les tueurs de sa famille, la Justice les relâche. C’en est trop pour une employée de banque qui a l’impression d’avoir le monde entier contre elle. Mais rien ne peut arrêter la colère d’une mère meurtrie et elle prendra le temps qu’il faudra.
Morel ne fait pas dans la dentelle : le scénario ne lui en laisse de toute façon pas le loisir. Ca commence par un pugilat sanglant à l’intérieur d’une berline et quelques flashbacks habilement distillés pour mettre en lumière le parcours dramatique de Riley et la méchanceté crasse du mafieux Diego Garcia qui semble avoir vérolé toutes les institutions (flics, procureur, juge = tous corrompus). En mode Taken, en accélérant davantage la mise en place, le réalisateur fait progresser son intrigue d’une manière fluide et intelligible, se permettant même de distiller quelques rares fausses pistes, effleurant quelques messages acerbes sur la vanité des puissants, l’iniquité des bourgeois, l’inefficacité des forces de l’ordre et la misère de certains pans de la société urbaine. Mais l’essentiel est dans l’action, et Morel sait faire, cadrant habilement les fusillades et les empoignades : comme dans les thrillers modernes depuis la saga Bourne, les protagonistes tirent pour tuer et ne vident pas leur chargeur à l’aveuglette ; certaines séquences d’infiltration de Riley semblent tirées d’un jeu vidéo, axées sur l’élimination la plus rapide et discrète possible des sous-fifres, en attendant la confrontation inévitable avec le boss de fin, via les éventuels lieutenants.
Jennifer Garner est plutôt à l’aise dans le rôle, et convaincante tant dans la douleur que dans le jeu de massacre. Il y a dans l’urgence de son interprétation quelque chose qui illumine le chemin tragique que suit insensiblement son personnage, dont l’issue ne peut être que fatale. Evidemment, sa transformation en guerrière ultime peut faire sourire par sa brutalité, mais qui peut dire ce qu’on peut apprendre des techniques de combat et de survie en cinq ans ? L’ellipse volontaire a au moins le mérite d’éviter de s’enliser dans des explications sordides et de libérer un maximum de temps pour l’action, c'est-à-dire la baston. Le reste du casting fait ce qu’il peut et s’en sort à peu près honnêtement, en dehors du bad guy assez grotesque.
Le DVD offre une image aux tons délavés, dans des tons grisâtres qui semblent refléter la tristesse de la condition humaine de laquelle un ange de la mort semble vouloir nous extirper. La VO est claire avec une excellente spatialisation des sons surround.
Rien de foncièrement féministe dans le traitement, mais la volonté de thésauriser sur l’émotion
et la souffrance comme moteurs d’une vengeance légitime quoique totalement surfaite. Finalement, on n’a pas beaucoup avancé depuis Un justicier dans la ville. Jusqu’au-boutiste, parfois captivant, parfaitement rythmé, une des sorties de l’année qui rivalisent déjà de promesses pour vous offrir une soirée agréable et intense. Dans un autre genre, les meilleures séries d’action vous tendent les bras.
En VOD, DVD et blu-ray chez Metropolitan FilmExport depuis le 19 janvier 2019.
Titre original |
Peppermint |
Date de sortie en salles |
12 septembre 2018 avec Metropolitan FilmExport |
Date de sortie en vidéo |
19 janvier 2019 avec Metropolitan FilmExport |
Photographie |
David Lanzenberg |
Musique |
Simon Franglen |
Support & durée |
DVD Metropolitan (2019) zone B en 2.39 :1 / 102 min |
Quand le réalisateur de Taken s’associe au scénariste de London has fallen et à l’actrice de la série Alias, on ne sera pas surpris que le maître-mot du film ne soit pas trop la subtilité mais plutôt l’efficacité. Il n’en demeure pas moins un formidable moyen de remettre en valeur une actrice trop rare sur nos écrans depuis quelques années : Jennifer Garner.
Riley North voit sa famille assassinée sous ses yeux et les coupables s’en tirer. Elle va donc se préparer pour venir se venger de tous ceux qui lui ont causé du tort.
La phrase d’introduction d’un film donne souvent la couleur et c’est une de fois plus vrai dans ce cas-ci. Quand Riley North lâche « You don’t remember me, do you ? » (« Tu ne te souviens pas de moi, hein ? »), plein de souvenirs, un peu lointains désormais, nous remontent à la mémoire : ce temps où Jennifer Garner était une héroïne d’action pour la télé (Alias) ou le cinéma (Elektra, The Kingdom). Il faut bien reconnaître qu’elle a cherché sur ses dix dernières années à élargir sa palette d’actrice délaissant les rôles physiquement exigeants. La voilà bien de retour au cinéma qui a fait sa renommée.
Bien que le film démarre le pied au plancher, on revient relativement vite sur l’origine de l’histoire et c’est en partie là que réside l’intérêt du métrage. Malgré des atours assez sauvages de film d’action calibré, on est face à une oeuvre centrée sur une performance d’actrice. Jennifer Garner, quasiment de tous les plans, nous offre à voir l’étendue de son talent en interprétant quasiment trois personnages bien distincts, chacun une facette de l’héroïne : la mère aimante et raisonnable, la veuve dévastée et, pour finir, la machine à tuer. Les adaptations dans l’intensité du regard, le ton de la voix ou les postures sont subtiles mais bien présentes. Voir ces trois versions d’un même personnage se télescoper n’a pas d’impact que sur la représentation du personnage mais aussi sur les petites scènes ou détails à côté de l’histoire. Quelques séquences, qui paraissent incongrues (elle rend la justice en bonne mère de famille) et présentes juste pour alléger la tension entre deux scènes d’actions, montrent bien que si ses compétences et sa résolution nouvelle ont été acquises, certains vieux réflexes restent. J’ai par exemple trouvé très drôle de la voir piquer une voiture et galérer pour attacher sa ceinture de sécurité, gênée qu’elle était par la présence d’un fusil mitrailleur. Cet investissement absolu jusque dans les détails est définitivement le point fort du film.
STX, société productrice du film, semble avoir compris qu’un marché avait été délaissé depuis quelques années et tente de fournir une offre afin de répondre à une demande potentielle. Les gros studios semblent désormais surtout se concentrer sur des films énormes et les indépendants peinent à grossir. Entre les deux, tout le marché de la série B à budget moyen a quasiment complètement disparu. C’est un peu ce créneau que des films comme Mile 22 ou ce Peppermint cherchent à remplir. On ne va pas se voiler la face, l’histoire est déjà vue et revue, le film ressemblant à s’y méprendre à une version féminine de The Punisher. L’attrait de celui-ci est qu’en dehors de la performance d’actrice, on a un solide metteur en scène d’action à la barre. Que l’on aime ses films ou pas, on ne peut pas nier que Pierre Morel ait un bagage qui lui permet d’optimiser les scènes d’actions vers l’essentiel : l’efficacité. C’est d'ailleurs une des plus grandes qualités du film : son aptitude à avancer sans cesse. Tout ce qui reste à l’écran a été dégraissé du superflu et le métrage fonce tout droit sans se retourner, jusqu’à l’absurde. Certaines scènes paraissent manquer, uniquement compensées par une ligne de dialogue. Il faut reconnaître cependant que leur addition aurait ralenti le rythme et n’aurait rien ajouté de plus.
Venons-en à ce qui fait déplacer les foules : l’action. Le manque d’originalité des situations est compensé par une grande maitrise de la scénographie et de la façon de faire avancer cette action. Les séquences de fusillades sont très fluides et remarquables dans leur habileté à permettre au spectateur une lisibilité sans faille des enjeux et des positionnements de protagonistes. Pierre Morel semble en tout cas s’être bien amusé à chorégraphier ces séquences. Une d’elles restera surtout en mémoire, celle de la boutique de piñata et son spectaculaire carnage. Jennifer Garner s’y révèle particulièrement efficace, presque trop pour un personnage que le trajet de vie ne menait pas dans cette direction.
Le seul vrai regret du film est un ressort dramatique utilisé mais pas exploité
correctement dans la dernière partie du film. La contextualisation des actions de l’héroïne du point de vue du reste de la population est quelque chose qui aurait pu apporter quelques questionnements éthiques, une réflexion sur la fonction et l’utilité des vigilantes, ces personnes qui agissent en dehors de la loi pour rendre une justice qu’ils estiment bafouée. C’est là que le film aurait pu se distinguer mais cela reste en filigrane afin de ne pas entraver la course en avant de l’histoire.
Peppermint est un bon film d’action de série B, un peu desservi par un scénario un peu trop prévisible, mais que l’investissement de l’interprète principale et l’efficacité de la mise en scène rendent plus que recommandables.
Peppermint - film 2018 - Pierre Morel - Cinetrafic
Action, Thriller. Avec Jennifer Garner, Tyson Ritter. Retrouvez les bandes-annonces et vidéos. Découvrez des films similaires. Dans Peppermint, film de vengeance au féminin, Jennifer Garner (Lov...