Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.
Sorte de fable cynique sur les déviances d'un microcosme replié sur lui-même, Maps To The Stars est une nouvelle occasion pour David Cronenberg de laisser libre court à ses délires trash et à son obsession sur la frontière entre réel et fantasme. Un film qui s'inscrit dans la lignée de Cosmopolis, proche de basculer dans la complaisance tout en restant intelligent et maîtrisé.
Présenté ce lundi à Cannes où il est en compétition officielle, le nouveau David Cronenberg risque à nouveau de susciter la polémique, après un Cosmopolis très controversé. Certains y verront une suite logique dans la filmographie du metteur en scène canadien, d'autres une forme d'enfermement dans l'autosatisfaction et l'autocitation à la limite de la caricature. Ce qui est en revanche certain, c'est que Maps To The Stars ne laisse pas indifférent et que ce portrait peu flatteur du microcosme hollywoodien s'inscrit parfaitement dans la thématique de prédilection du réalisateur de Vidéodrome. En condensant toutes les déviances d'un système ne jurant que par le paraître et l'hypocrisie en un temps et un lieu précis (l'histoire suit ainsi deux familles au lourd héritage), le metteur en scène, à la démarche d'un scientifique derrière son microscope, se penche une nouvelle fois sur un monde en décadence pourri de l'intérieur, tellement rongé par ses propres vices qu'il n'arrive pas à démêler le réel et l'illusion.
Mélangeant symbolique et réalisme, avec de fréquentes apparitions de figures spectrales hantant des personnages caricaturaux mais pourtant incarnés avec un certain talent et une très grande spontanéité par un casting souvent sous employé (John Cusack, Julianne Moore, Olivia Williams) ou jouant ironiquement sur son image (Robert Pattinson passe désormais à l'avant de la limousine), David Cronenberg s'emploie à continuer de sonder les tréfonds d'une société faite de paradoxe et de contradictions (comme l'atteste le poème de Paul Eluard cité en boucle dans le film), comme pour mieux se moquer de son impossibilité à faire face à ses erreurs. Car le ton est bien souvent comique malgré l'apparente austérité d'une mise en scène s'amusant de ce décalage volontaire. Attention néanmoins à ce que le réalisateur ne tombe pas dans la parodie en poussant de plus en plus ses films vers une sorte d'onirisme auteurisant surtout complaisant.
Si vous n'êtes pas hermétique au réalisateur, vous apprécierez probablement.
Titre original |
Maps to the stars |
|
Réalisation |
David Cronenberg |
|
Date de sortie |
21 mai 2014 (à Cannes) |
|
Scénario |
Bruce Wagner |
|
Distribution |
Julianne Moore, Mia Wasikowska, Robert Pattinson & John Cusack |
|
Photographie |
Peter Suschitzky |
|
Musique |
Howard Shore |
|
Support & durée |
35 mm / 111 min |
Synopsis : A Hollywood, la ville des rêves, se télescopent les étoiles : Benjie, 13 ans et déjà star ; son père, Sanford Weiss, auteur à succès et coach des célébrités ; sa cliente, la belle Havana Segrand, qu’il aide à se réaliser en tant que femme et actrice.
La capitale du Cinéma promet aussi le bonheur sur pellicule et papier glacé à ceux qui tentent de rejoindre les étoiles : Agatha, une jeune fille devenue, à peine débarquée, l’assistante d’Havana et le séduisant chauffeur de limousine avec lequel elle se lie, Jerome Fontana, qui aspire à la célébrité. Mais alors, pourquoi dit-on qu’Hollywood est la ville des vices et des névroses, des incestes et des jalousies ? La ville des rêves fait revivre les fantômes et promet surtout le déchainement des pulsions et l’odeur du sang.