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Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.

[critique] Miss Peregrine & les Enfants particuliers

[critique] Miss Peregrine & les Enfants particuliers

Un Tim Burton très sympathique, qui, à défaut de pouvoir se hisser au même niveau que les classiques Edward Scissorhands ou Ed Wood, n’en demeure pas moins bien plus réussi que nombre des récentes productions du réalisateur, malgré un scénario parfois grotesque. Big Eyes annonçait le retour d’un artiste conscient de s’être laissé enfermer dans une sorte de caricature, Miss Peregrine Et Les Enfants Particuliers est une belle bouffée d’air frais, optimiste pour la suite de sa carrière.

Que l’on soit bien clair : ce n’est pas le Tim Burton que l’on attendait. Si Miss Peregrine Et Les Enfants Particuliers n’avait d’ailleurs pas été réalisé par ce metteur en scène, nul doute que nous aurions été moins indulgents. Mais même les plus mauvais films de l’auteur, soit une bonne moitié depuis Ed Wood, ont toujours quelque chose de captivant pour qui a adoré Edward Scissorhands à l’époque. L’homme est tellement sensible et doué qu’on lui excuse tout, trouvant des explications parfois capillotractées pour justifier ses ratés artistiques, devenant par là même des objets fascinants à analyser. La Planète Des Singes ? Bof, pas de sa faute, il a dû avoir des difficultés avec la production sur le tournage ! Big Fish différent ? Ben oui, il vient d’être père ! Alice ? C’est une commande de studio ! Dark Shadows ? Il est obligé de ressasser inlassablement ses figures gothico-poétiques car c’est ce que le public attend désormais de lui ! Big Eyes, qui n’était pas un grand film, avait pour lui de montrer un réalisateur conscient de l’image qu’il renvoyait aux spectateurs, enfermé dans une caricature qui le dépassait. C’était un petit retour enthousiasmant, et nous avions très envie de voir vers quoi le metteur en scène allait se diriger ensuite. 

[critique] Miss Peregrine & les Enfants particuliers

Autant dire que nous attendions Miss Peregrine Et Les Enfants Particuliers avec impatience. Contrairement à ce que l’on a pu laisser penser : non, ce n’est pas un mauvais film. C’est même un Tim Burton très sympathique, bourré de bonnes idées, qui, à défaut de pouvoir se hisser au même niveau que les classiques Edward Scissorhands ou Ed Wood, n’en demeure pas moins très réussi comparé à nombre de productions récentes du réalisateur.

Mais…

 

Ce n’est pas un bon Tim Burton. Car avec un tel sujet, un tel matériau de base –pour rappel il s’agit à l’origine d’un livre écrit par Ransom Riggs - l’on pouvait envisager une adaptation un peu plus profonde, avec des thématiques autrement mieux intégrées au récit. Ici, Tim Burton semble avoir joué la carte de la facilité, en ne faisant qu’un « simple » film fantastique, dépourvu de réelle ambition, comme si le sous-texte de l’œuvre importait peu. Il en ressort un film très agréable, certes, mais potentiellement un peu décevant. Car l’on se demande si le réalisateur a toujours quelque chose à dire. S’il retrouvera enfin un jour sa créativité, sans qu’elle ne paraisse factice. 

[critique] Miss Peregrine & les Enfants particuliers

Quoiqu’il en soit, nous sommes optimistes : Miss Peregrine n’en fait pas des tonnes pour parvenir à recréer un univers burtonien, le réalisateur ne faisant ni appel à ses comédiens de prédilection (quoiqu’Eva Green avait déjà eu l’occasion de jouer dans Dark Shadows), ni à Danny Elfman (il n’était pas disponible), alors que le récit se prêtait pourtant bien aux extravagances habituelles de ses traditionnels collaborateurs. Miss Peregrine fait dans la sobriété, donc… pour se contenter finalement de ressembler à ce que n’importe quel autre metteur en scène aurait pu faire s’il avait voulu plagier le style du réalisateur de Big Fish. Pourquoi cet optimisme donc ? Parce que cela prouve que Tim Burton, après Big Eyes, est encore plus conscient de ce qu’il est devenu avec le temps et les nombreux succès au Box-Office. Et qu’il devrait en toute logique entamer une autre période de sa carrière, probablement moins contrainte par une image, une marque de fabrique, qui commençait à le desservir.

 

Ainsi, Miss Peregrine aurait pu être bien plus burtonnien, du moins en ce qui concerne sa direction artistique et son casting. Pourtant, on retrouve par instants des petites touches éparses et typiques du réalisateur (des haies taillées pour ressembler à des dinosaures, des manèges étranges), conférant au long-métrage une singularité bienvenue. Du Burton à petite dose, pour une meilleure efficacité. Miss Peregrine verse ainsi beaucoup moins dans la caricature que Dark Shadows. L’on s’amuse beaucoup en découvrant les pouvoirs de ces enfants particuliers, d’autant que le film n’est pas avare en rebondissements et en action les mettant en valeur avec intelligence (Tim Burton n’a jamais été un excellent metteur en scène pour les scènes d’action, mais ici elles sont plutôt correctes, la 3D apporte un plus indéniable). 

[critique] Miss Peregrine & les Enfants particuliers

L’on pourra en revanche reprocher au film de mettre un temps fou à démarrer, la faute à un scénario poussif voire grotesque. L’on met au défi quiconque de comprendre réellement les enjeux de l’intrigue tant la narration basée sur des allers-retours dans le temps nous a semblé impossible à suivre sans se poser continuellement des questions sur la crédibilité de ce qui nous est présenté comme des évidences. Il faut s’accrocher pour capter le contexte et le fonctionnement de ce monde parallèle coincé dans le temps et avec ses habitants revivant continuellement la même journée. De fait, Miss Peregrine oscille entre réjouissances et interrogations, le film ne parvenant jamais à trouver le ton juste, ni un quelconque intérêt.

On suit néanmoins cette étrange bande digne des X-Men avec grand plaisir, mais il vous faudra accepter quelques écarts artistiques et narratifs, tel le rôle accordé à un méconnaissable Rupert Everett ou bien encore le cabotinage de Samuel L. Jackson et Eva Green. C’est finalement le duo d’Asa Butterfield et Ella Purnell qui convainc le plus (en tant qu’acteurs, car leur rôle manque d’épaisseur), ainsi que quelques scénettes surprenantes, comme celle en stop-motion qui donne à penser que l’utilisation de cette technique d’animation aurait été fort judicieuse pour l’une des grosses scènes d’action du film. On s’étonnera de l’orientation tout public de Miss Peregrine, tant certains passages nous ont semblé particulièrement violents pour les plus jeunes.

Reste que l’on a affaire à un Tim Burton mineur, mais bien meilleur que ce à quoi il nous a habitué depuis quelques années. Et c’est en cela que l’on peut le considérer comme une belle bouffée d’air frais : comme avec Big Eyes, nous pensons que le réalisateur peut revenir en forme et redonner du peps à sa carrière.

Une vidéo de notre rencontre en q&a avec Tim Burton devrait suivre.

Merci encore à Léa et à Constance. 

 

Titre original

Miss Peregrine’s Home For Peculiar Children

Mise en scène 

Tim Burton

Date de sortie

05/10/2016 avec 20th Century Fox

Scénario 

Jane Goldman & Ransom Riggs d'après son oeuvre 

Distribution 

Eva Green, Asa Butterfield, Samuel L Jackson, Ella Purnell, Terence Stamp & Judi Dench

Photographie

Bruno Delbonnel

Musique

Michael Higham & Matthew Margeson

Support & durée

3D en 1.85 : 1 / 127 minutes

 

Synopsis : À la mort de son grand-père, Jacob découvre les indices et l’existence d’un monde mystérieux qui le mène dans un lieu magique : la Maison de Miss Peregrine pour Enfants Particuliers. Mais le mystère et le danger s’amplifient quand il apprend à connaître les résidents, leurs étranges pouvoirs …  et leurs puissants ennemis. Finalement, Jacob découvre que seule sa propre "particularité" peut sauver ses nouveaux amis.

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